« Lorsque nous avons déposé une demande de permis exclusif de recherche (PER) en 2011, l'administration a été un peu surprise », se souvient Dominique Delorme, porte-parole de Cominor, filiale du producteur d'or La Mancha. Et pour cause : c'était la première demande de ce type depuis une trentaine d'années en France. Depuis, quatre PER ont été accordés et treize autres sont à l'étude, déposés par six opérateurs miniers différents. Mais que viennent donc chercher ces sociétés dans le sous-sol français ? Des métaux. Avec l'envolée du cours de l'or en 2011 et la demande croissante en métaux dits stratégiques, utilisés par l'industrie high-tech notamment, l'or, le tungstène, l'étain, l'antimoine… attirent les convoitises. Or ils se trouvent en quantité raisonnable dans le sous-sol métropolitain, comme l'a révélé l'inventaire du BRGM, réalisé entre 1975 et 1991.
À la suite de l'intérêt affiché par les opérateurs miniers, le gouvernement a décidé de prendre le train en marche, en espérant sécuriser l'approvisionnement des industries françaises en métaux. En février 2014, Arnaud Montebourg, alors ministre du Redressement productif, annonce la création d'une nouvelle Compagnie nationale des mines, en charge d'explorer et d'exploiter les richesses des roches françaises. Elle ne verra pas le jour. « Nous avons déjà deux opérateurs miniers français, Areva et Eramet, qui sont positionnés sur des minerais différents et dans lesquels se trouvent des capitaux publics, expose un conseiller au cabinet d'Emmanuel Macron, le ministre de l'Économie ayant repris le dossier. La réflexion s'oriente vers une utilisation de cet existant plutôt que vers la création d'une nouvelle société de toute pièce. Mais cela ne se fera qu'à long terme. »
Dans l'immédiat, Emmanuel Macron compte bien poursuivre la relance du secteur en s'appuyant sur la réforme du Code minier. Thierry Tuot, conseiller d'État, a été chargé de proposer un projet de loi, avec la participation d'un groupe de travail associant les différentes parties prenantes. Ses préconisations ont été reprises, plus ou moins en l'état, dans 43 articles constituant un avant-projet de loi soumis à la consultation publique début avril. Mais d'autres ont disparu, notamment concernant l'après-mine, au grand dam des associations de protection de l'environnement. « Le rapport Tuot prévoyait qu'après la fermeture d'une mine, l'autorité administrative puisse contraindre pendant vingt ans l'exploitant à des mesures de suivi, et puisse engager la responsabilité de l'exploitant en cas de problème pendant trente années supplémentaires, or rien de tout cela n'a été repris », déplore Olivier Gourbinot, de France Nature Environnement (FNE).
Les ONG sont également mécontentes de la méthodologie selon laquelle ce nouveau Code minier sera établi : les articles 1 à 43 ont été soumis à consultation publique, mais l'article 46 an-nonce que le reste du Code minier sera réformé par ordonnance, et « échappera donc au débat démocratique », dénonce Juliette Renaud, chargée de campagne RSEE et industries extractives aux Amis de la Terre. Difficulté supplémentaire : les articles de l'avant-projet prévoient l'entrée en vigueur des dispositions en faveur de l'environnement lors de la ratification de l'ordonnance tandis que les autres dispositions, elles, entreraient en vigueur à la publication de l'ordonnance. Or un délai de plusieurs mois ou années peut séparer les deux étapes.
Le gouvernement a aussi mis en place la démarche Mine responsable, lancée en mars. Elle consiste à rédiger un Livre blanc décrivant le principe d'un projet minier. Il sera associé à une charte d'engagement volontaire que les opérateurs seront invités à signer. Un comité de pilotage a été mis en place. Certains, comme les Amis de la Terre, ont refusé d'y participer. « L'objectif de ce comité est la réouverture de mines en France, explique Juliette Renaud. Or pour nous, les priorités ne sont pas là. Nous voulons voir privilégiées la réduction des consommations de métaux et l'amélioration du recyclage. » Ce comité a tout de même tenu sa première réunion le 1er avril. Le Livre blanc et la charte devraient voir le jour à l'automne prochain.