L'océan est immense, certes, mais y trouver une place pour implanter des fermes pilotes d'éoliennes flottantes n'est pas si facile. Car les contraintes existent, de même que l'indispensable cohabitation avec les autres usages du milieu marin. Pour organiser au mieux le déploiement de cette nouvelle source d'énergie renouvelable, l'État a donc annoncé le lancement d'un appel à manifestation d'intérêt (AMI) pour des fermes pilotes. Il est attendu pour ce mois de juillet. En amont, il a demandé aux préfets coordonnateurs de façades maritimes d'identifier les zones propices à l'installation de ces machines. Dès décembre 2014, les différentes préfectures se sont donc penchées sur la question. « L'éolien flottant est un enjeu important en Méditerranée », souligne Nicolas Singellos, administrateur des affaires maritimes à la Direction interrégionale de la mer (DIRM) Méditerranée. « Les fonds marins descendent très rapidement à partir de la côte. Cela engendre une forte opposition des acteurs locaux à l'éolien posé, qui ne pourrait être installé que dans les zones assez proches du rivage. Avec l'éolien flottant, il est possible de s'affranchir de cette contrainte et de s'installer plus loin. » Pour des raisons technico-économiques, liées notamment au raccordement ainsi qu'à la profondeur maximale de l'ancrage, les éoliennes flottantes ne peuvent cependant pas être déployées à plus de 37 km du rivage et de 200 mètres de profondeur. D'autres critères, comme la vitesse moyenne du vent à 100 mètres d'altitude, la bathymétrie, le marnage, la hauteur significative de la houle et les vitesses des courants de marée, sont également à prendre en compte pour évaluer la faisabilité des projets. « L'analyse des données de vent, fournies par Météo-France, permet de caractériser le potentiel de productible », résume la préfecture des Pays de la Loire. « L'analyse des autres données descriptives du milieu physique donne des informations relatives aux coûts d'investissement, d'opération et de maintenance des projets. »
En prenant en compte ces premières contraintes, le Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) a pu réaliser à l'échelle nationale des cartes. Elles indiquent les zones techniquement exclues pour le développement de l'éolien flottant et les zones favorables. « Nous avons ensuite affiné ces cartes en fonction des enjeux d'acceptabilité, définis localement par les services de l'État au niveau des différentes façades maritimes », complète Léa Thiebaud, ingénieure d'études. Car, au-delà de la faisabilité, la deuxième grande contrainte pour les énergies marines, et donc pour l'éolien flottant, reste la cohabitation avec les autres usagers du milieu marin. « Même si l'éolien flottant permet d'éviter la zone où se concentre une grande partie des activités maritimes, située entre 0 et 6 miles de la côte, il doit tout de même se faire une place entre le transport maritime, de marchandises ou de plaisance, la défense nationale, la pêche et bien sûr les zones de protection de l'environnement », observe Nicolas Singellos.
En Méditerranée, la DIRM a donc organisé des réunions bilatérales avec les représentants de chaque catégorie d'acteurs concernés afin d'entendre les contraintes des uns et des autres, pour mieux définir des zones de développement acceptables par tous. Au final, le rapport rendu par la DIRM en avril préconise trois zones de développement, dont deux contenant un périmètre entièrement validé par les pêcheurs et les autres acteurs. « Dans le reste des zones propices, il appartiendra aux porteurs de projet de reprendre la concertation pour que l'acceptabilité soit la meilleure possible. » Ceux-ci devraient notamment assurer la mise en place d'un suivi des impacts environnementaux et socio-économiques des fermes pilotes. « Nous souhaiterions que les fermes soient installées dans un premier temps avec uniquement quelques machines et prouvent leur absence d'impact », annonce l'administrateur de la DIRM Méditerranée. Il faudra à présent attendre le cahier des charges de l'appel à manifestation d'intérêt pour voir, parmi les recommandations ainsi émises par chaque façade maritime, lesquelles auront été retenues. La construction des premières fermes pilotes d'éoliennes flottantes pourrait ensuite commencer à partir de mi-2017.