L e lac savoyard ne reçoit plus que 30 tonnes de phosphates par an, contre 300 tonnes en 1974 ! Depuis 2006, leur concentration est descendue à 15 µg/l et même à 10 µg/l en 2011, atteignant ainsi le « très bon état » sur ce paramètre au titre de la directive-cadre sur l'eau. L'eau potable n'y subit qu'une désinfection simple, voire, sur un secteur, aucun traitement, et sept plages de baignade sur dix sont en classe A. Si le Bourget atteint ce niveau de pureté après plus de cinquante ans d'eutrophisation, c'est grâce à un plan d'actions tous azimuts.
Dès 1980, une galerie de 12 km a été creusée, détournant vers le Rhône les rejets des stations d'épuration d'Aix-les-Bains et de Chambéry. « Ce fleuve a un bon taux de dilution. Son suivi a prouvé qu'il n'y a aucune conséquence majeure », assure Renaud Jalinoux, directeur du Cisalb (Comité intersyndical pour l'assainissement du lac du Bourget). « D'ailleurs, ajoute-t-il, ces deux stations ont été rénovées à partir de 2000 et 50 millions d'euros seront encore investis jusqu'en 2013 sur celle de Chambéry. » L'amélioration de l'assainissement a aussi concerné, dans les années 1980-1990, une vingtaine de stations rejetant, elles, dans des rivières qui alimentent le lac.
La mobilisation, soutenue par des financements de l'agence de l'eau, de l'État, de l'Europe, du Département de la Savoie et de la Région Rhône-Alpes, s'est ensuite élargie. « Avant 2000, les industriels, les artisans et les agriculteurs se renvoyaient la responsabilité, commente Renaud Jalinoux . Nous avons démontré que si tout le monde est impliqué, on peut être efficace. Le Comité de bassin-versant est le cadre de cette démarche collective. » Dans le cadre d'un premier contrat de bassin-versant (2003-2009) puis de l'actuel (2011-2017), chacun d'une enveloppe de 80 millions d'euros, les éleveurs sont ainsi aidés à mettre aux normes leurs bâtiments et à traiter les effluents. Une action similaire a été engagée auprès des artisans et entreprises. « Des succès », assure le directeur. En parallèle, le réseau autoroutier a été doté de 12 bassins de sto ckage pour parer aux pollutions ac ci dentelles et les eaux plu viales n'arrivent plus au lac qu'en passant par des filtres plantés de ma cro-phytes. Enfin, 31 communes se sont déjà engagées à réduire de moitié l'usage des pesticides. Reste à convaincre les agriculteurs d'en faire autant.
L'effort de maîtrise des apports de phosphates doit être maintenu. En effet, les bons résultats actuels sont fragiles, car largement dus à la baisse de la pluviométrie depuis 2003. Autre chantier : poursuivre la restauration des rivières, des zones humides et des roselières. Celle-ci, tout comme la lutte contre l'eutrophisation, a déjà permis le retour du lavaret, un salmonidé dont la reproduction a dû être assistée pendant vingt ans. C'est encore le cas de l'omble chevalier, qui souffre, lui, du réchauffement climatique et de la présence de toxiques comme le PCB… Un autre point sur lequel le Cisalb va travailler.