La contamination délibérée d'un réseau d'eau potable constitue un risque à probabilité faible, mais les gestionnaires doivent néanmoins la prendre en compte car les conséquences peuvent être rapidement très graves. Pendant quatre ans, quatorze partenaires européens du projet SecurEau (Security and decontamination of drinking water distribution following a deliberate contamination), mené dans le cadre du 7e programme-cadre de recherche et développement, ont donc décortiqué la problématique.
Première étape : permettre la détection précoce d'événements anormaux. « Il ne s'agissait pas de développer un capteur spécifique à un type de contaminant, car il y en a une infinité, mais plutôt d'améliorer l'utilisation de capteurs existants. En les installant hors période de crise, il est possible de déterminer une ligne de base des différents paramètres, avec des variations journalières, hebdomadaires ou même saisonnières. Et cela permet alors de détecter toute variation anormale », explique Sylvain Fass, coordonnateur du projet à l'université de Lorraine. Avec la société Endetec, filiale de Veolia, trois types de capteurs ont été développés, axés sur l'autonomie en énergie, la transmission des données ou encore la rapidité d'installation. Le premier, qui mesure les paramètres classiques (température, pH, concentration en chlore ou encore conductivité), est déjà disponible sur le marché. Un deuxième capteur de mesure UV de la matière organique est en phase de préindustrialisation. Le dernier, développé en partenariat avec le CEA, est destiné à la détection de quelques radionucléides. Tous ont été placés en test sur deux réseaux européens (l'un, urbain, de 400 000 habitants, et l'autre, rural, de 50 000 habitants).
Irstea a de son côté développé un modèle déterminant leur positionnement idéal sur un réseau, ce en fonction de ses caractéristiques hydrauliques. « Le gestionnaire fixe ses contraintes comme le nombre maximum de capteurs, les lieux stratégiques où les placer, des écoles par exemple. Un second modèle simule une contamination avec la configuration établie et donne ensuite le temps moyen de détection, par exemple. C'est alors au gestionnaire d'arbitrer sur l'acceptabilité du risque et peut-être de revoir ses contraintes », détaille Sylvain Fass.
Enfin, les chercheurs ont aussi étudié les stratégies existantes pour une décontamination rapide et efficace du réseau. « La partie eau n'est pas la plus problématique car on sait vidanger le réseau. Cela devient plus complexe lorsque le contaminant migre sur les parois, dans les dépôts ou les biofilms », ajoute le chercheur. L'efficacité de plusieurs méthodes a été testée en laboratoire telles que la désorption ou l'oxydation avancée. Les conclusions du projet pourront donc aider les gestionnaires de réseaux à mettre en place une stratégie de prévention de ce type de risque.