F ortes de l'autorisation d'injection du biométhane dans le réseau parue en juin dernier, les stations d'épuration de Strasbourg, Bordeaux et Grenoble vont se lancer. Les avantages sont nombreux : améliorer la rentabilité du site et utiliser le biogaz sur place. De plus, la méthanisation réduit de 30 % le volume de boues. C'est d'autant plus intéressant que les autres débouchés s'amenuisent : l'épandage est très réglementé, l'incinération peut se révéler coûteuse et la mise en décharge sera bientôt interdite. Avec un bémol : le montant des investissements. Quel est le potentiel de développement de cette filière ? Une étude commandée par l'Ademe et le gestionnaire de réseau de gaz GrDF, réalisée en 2014 par le cabinet Greenbirdie et le centre de recherche de GDF Suez (Crigen), fournit des réponses. Le potentiel d'injection du biométhane issu de Step pourrait atteindre 0,54 TWh par an à l'horizon 2020 et 1,41 TWh par an en 2050.
À partir du gisement total que produiraient les 19 521 Step de France métropolitaine, soit 2,13 TWh par an en 2014, 2,19 TWh par an en 2020 et 2,40 GWh par an en 2050, l'étude a sélectionné les sites aptes à traiter les boues par méthanisation in situ ou par codigestion. Il s'agit des stations de plus de 5 000 EH, qui représentaient un gisement de 1,82 TWh en 2014. Enfin, l'étude a pris en compte de multiples paramètres, comme la réglementation, l'accessibilité au réseau de gaz, l'autoconsommation et les autres valorisations pour obtenir le potentiel injectable. Il est donc compris entre 0,06 et 0,54 TWh par an à l'horizon 2020 et entre 0,6 et 1,41 TWh par an en 2050.
Lorsque les stations d'épuration sont trop petites, les boues peuvent être traitées dans des unités de méthanisation territoriales. Néanmoins, le potentiel de cette solution reste faible (0,2 à 0,45 TWh par an en 2050) au vu de « ses coûts de transport, les boues étant assez liquides, l'interdiction d'épandage sur certains champs, par exemple en bio ou pour Bonduelle, et le classement automatique en ICPE soumise à autorisation, une procédure très contraignante », détaille Nathalie Camus, chef de projet à Greenbirdie.
Le potentiel de 0,06 TWh par an en 2020 correspond au biométhane produit par les stations de Grenoble, de Strasbourg et de Bordeaux. La fourchette haute de 0,54 TWh par an comprend, parmi les quatre-vingt-cinq stations d'épuration possédant déjà un méthaniseur, celles desservies par le réseau de gaz et dont la capacité est supérieure à 60 000 EH. Le seuil, selon les auteurs, à partir duquel une filière d'injection de biométhane est économiquement pertinente. Ce potentiel paraît bien faible comparé aux 500 TWh de gaz consommé chaque année en France. Mais, au-delà des seules Step, la filière de l'injection du biométhane est récente. Les premiers arrêtés datent de 2011 et six méthaniseurs agricoles et territoriaux seulement injectent dans le réseau. La tendance devrait s'accélérer : l'Ademe prévoit qu'en 2050, 10 à 15 % du gaz circulant dans le réseau seront issus de la méthanisation. Lydie Bahjejian