Organiser la gestion des boues à l'échelon départemental est une réponse à des problèmes particuliers pour le retour au sol ou face à des filières locales inadaptées.
Dans le bassin Rhône-Méditerranée Corse, certains départements ont profité de l'élaboration de leurs plans départementaux d'élimination des déchets non dangereux pour y intégrer des schémas de gestion des boues d'épuration. En Isère, le schéma a été finalisé à l'été 2015. « Le Département attribue entre 5 à 7 millions d'euros par an à des aides à l'investissement pour l'eau et l'assainissement des collectivités, d'où l'intérêt de se doter d'un outil de planification. Cela pourrait nous éviter de financer deux communes voisines si elles peuvent mutualiser un équipement de traitement ou de valorisation des boues », souligne Yohann Giraud, du service aménagement et eau au conseil départemental de l'Isère. « Le schéma a également favorisé la mise en réseau des collectivités et ouvert des opportunités comme l'élaboration de filières de valorisation de secours ou la mise en œuvre de mutualisations dans des projets de méthanisation, par exemple », ajoute le chargé de projet. Dans le département, qui a des taux de 31 % d'incinération, 37 % de compostage et 31 % d'épandage direct, le diagnostic a montré que la capacité de traitement des sites était légèrement excédentaire, rendant possibles des apports des départements voisins. En revanche, certaines collectivités iséroises font traiter leurs boues hors du département. « C'est souvent lié aux délégataires dans la mesure où la part du transport n'est pas nécessairement prépondérante dans le coût global de gestion de ces déchets dans les contrats. »
À l'inverse, dans les Alpes-Maritimes, l'étude lancée en 2012 a montré que plus de la moitié des tonnages de boues produits par le département étaient exportés dans le reste de la région Paca. « Entre le relief et la pression foncière très forte, la valorisation agricole est quasiment absente de notre territoire. Nous exportons donc une part du flux vers des centres de compostage de départements voisins. Mais à l'avenir, l'objectif est d'absorber le flux exporté en sollicitant davantage les unités de valorisation énergétique et en développant malgré tout des filières de valorisation agronomique locales », explique Aurélien Chartier, chargé de mission au conseil départemental des Alpes-Maritimes. Ainsi, la majorité des petites communes de montagne manquent de solutions pour gérer leurs boues. Le schéma a donc dégagé des scénarios pour mutualiser le traitement de villages de 100 à 200 EH dans des stations d'épuration dites support de 2 000 à 4 000 EH. Les boues d'épuration produites y sont progressivement utilisées sous forme d'amendement pour verdir et restructurer le sol des pistes de ski. Cette valorisation originale, déjà opérationnelle à La Colmiane et bientôt à Isola 2000, n'aurait pas été possible sans une vision territoriale.