Par Mathieu Boillot, ingénieur de recherche chez SaurLes stations d’épuration de moins de 5?000 EH manquent d’outils pour gérer l’évacuation de leurs boues de manière économique et efficace. Hors mutualisation d’une unité de déshydratation fixe ou mobile, les boues sont gérées sous forme liquide avant épandage agricole, avec nécessité de stockage. Pendant longtemps, ces boues liquides ont été traitées sur des lits de séchage pour réduire leur volume et limiter les odeurs. Il s’agit d’un procédé rustique et robuste, constitué d’un massif drainant de sable et de gravier sur lequel les boues sont directement alimentées. Mais il est progressivement tombé en désuétude, car son exploitation est difficile. En effet, la siccité obtenue dépend fortement des précipitations qui humidifient les boues. La récolte des boues sèches est longue et fastidieuse, et les boues évacuées sont chargées d’une fraction importante de sable qui augmente les coûts d’évacuation.Pour pallier ces inconvénients, Saur a développé il y a une dizaine d’années des lits de séchage mécanisés couverts par des serres. La récolte des boues y est assurée par une toile filtrante mobile qui s’enroule autour d’un rouleau motorisé. Mais les limites de ce système sont apparues au bout de plusieurs années d’exploitation. Il s’avère que le lit drainant se colmate progressivement, sa planéité devient irrégulière, les boues sont plus difficiles à déshydrater et l’enrouleur de la toile mobile est alors fortement sollicité lors de la récolte.Un nouveau système de lit mécanisé baptisé Heliodry a donc été testé avec succès pendant l’année 2015 par la modification d’un des quatre lits à massif de sable de la station d’épuration de la Possonnière (Maine-et-Loire) de 2?500 EH. Dans cette configuration, le massif de sable est remplacé par une toile filtrante supportée par un caillebotis qui assure la fonction drainante. La toile filtrante a été choisie pour ses qualités de fort taux de capture des matières en suspension, une perméabilité importante et une bonne résistance mécanique. Cette toile fixe est recouverte par la toile mobile qui permet la récolte mécanisée des boues. Lors de la récolte, l’enroulage de la toile est ainsi facilité, car les forces de frottements sont réduites et la charge du lit est homogène. Enfin, le procédé est couvert par une serre agricole ouverte où l’aération naturelle évapore l’eau résiduelle des boues sans consommation électrique de ventilation.Le fonctionnement de ces lits est simple et nécessite une surveillance très modérée. Les boues liquides sont floculées en ligne avant l’alimentation du lit, car les performances d’égouttage sont fortement liées à la qualité de la floculation. Dans la phase de déshydratation qui dure environ 24 heures, les matières en suspension sont retenues par les toiles filtrantes alors que l’eau s’écoule par gravité au travers et les égouttures retournent en tête de station. Suit la phase de séchage qui dure cinq semaines durant lesquelles l’eau résiduelle des boues s’évapore par l’action de l’air et du soleil sous la serre. La mince épaisseur de boues déshydratées et leur faible teneur en eau réduisent considérablement le risque d’émissions d’odeurs. Le séchage naturel ne nécessite aucune source d’énergie supplémentaire. En contrepartie, l’intensité du séchage est dépendante des conditions climatiques. La siccité finale des boues récoltées varie de ce fait entre 20 % en hiver à 80 % en été. Il est à noter que même à 20 % de siccité, les boues déshydratées sont pelletables.Les boues sont ainsi récoltées par l’enroulage motorisé de la toile mobile en moins d’une heure. Cette opération d’extraction est effectuée chaque semaine lit par lit. Les lits seront réalimentés tour à tour, pour une période de rotation de cinq semaines. Ils ne présentent en outre aucun risque de colmatage à long terme, car la toile filtrante peut être facilement nettoyée. L’exploitation est simplifiée, car le caillebotis réduit l’inhomogénéité de l’épaisseur des boues, donc du séchage. Les boues sèches peuvent être stockées dans un hangar ouvert pendant plusieurs mois. Toutes les voies de valorisation sont possibles, car la siccité moyenne est supérieure à 50 % : valorisation agricole, compostage ou incinération selon les cas. Aussi, il est aisément possible de séparer les lots de boues en cas de risque de pollution.Les avantages offerts par ce système ont séduit la commune de Rians (Cher) qui enregistrait de rares dépassements de la teneur en métaux de ses boues. Sa nouvelle station d’épuration (1?000 EH) a été équipée du procédé Heliodry. L’unité mise en service au printemps 2016 représente la première référence de Saur. Elle comporte 5 lits de 63 m2 chacun. Les premiers cycles d’alimentation et de récolte des boues montrent des performances conformes aux attentes de la commune. Dans le cas où les boues ne peuvent pas être valorisées par voie agricole, le transport et le traitement des boues non conformes étaient auparavant compliqués par le fait qu’elles étaient liquides. Grâce aux lits de séchage, tous les exutoires sont désormais accessibles et une gestion par lots, inhérente au procédé, gère efficacement les flux de boues sèches.