La perception du risque de tsunami dans la mer Méditerranée est faible, soulèvent les chercheurs dans une enquête publiée en 2019. Pourtant, le 30 octobre 2020, un important tsunami déclenché par un séisme de magnitude 7,0 Mw a frappé l’île de Samos en Grèce et le littoral de la mer Égée dans la région d’Izmir en Turquie. Cette catastrophe qui a suscité des dégâts humains et matériels considérables, a montré la difficulté d’alerter lors des tsunamis soudains et l’incapacité des autorités locales et des communautés à risque de prendre des mesures rapides.
Et cette menace est toujours dans les radars ! Les scientifiques estiment à plus de 95 % la probabilité qu’un « tsunami ait lieu au cours des 30 prochaines années en mer Méditerranée », explique Vladimir Ryabinine, secrétaire exécutif de la Commission océanographique intergouvernementale de l’Unesco lors d’une conférence de presse tenue le mardi 21 juin.
Pour mieux préparer les zones méditerranéennes face à ce risque, l’Organisation de l’ONU pour l’éducation, la science et la culture (Unesco) annonce l’extension de son programme « Tsunami Ready » à la Méditerranée. Objectif : sensibiliser les populations et contribuer à l’émergence de communautés côtières plus résilientes.
Préparer 100 % des populations côtières au risque
40 communautés, réparties entre 21 pays (Asie, Caraïbes, Pacifique), sont aujourd’hui identifiées comme étant prêtes à ce risque par le programme « Tsunami Ready ». Mais ce n’est pas suffisant, l’Unesco entend intégrer de nouvelles communautés de la Méditerranée sous ce statut pour s’assurer à terme que 100 % des populations côtières à risque soient prêtes à réagir. Certaines zones de la Méditerranée sont déjà avancées sur ce chemin. Alexandrie en Égypte, Istanbul en Turquie, les îles grecques de Kos et Samos ainsi que Cannes en France, effectuent les démarches nécessaires pour appliquer le programme.
Pour devenir « Tsunami Ready », les régions engagées doivent respecter douze critères. Il s’agit dans ce programme d’élaborer un plan de réduction des risques de tsunami à l’échelon communautaire, désignation et cartographie des zones à risque, affichage public d’informations sur les tsunamis, mise au point de cartes d’évacuation faciles à appréhender, et mise au point de supports de sensibilisation et d’éducation des populations via des exercices d’évacuation en cas de vagues de tsunami.
Comprendre et alerter
Outre la sensibilisation et préparation des populations, l’Unesco mise également sur l’anticipation. L’organisation mène des études pour mieux saisir les causes de tsunamis et affiner ses systèmes d’alerte pour protéger les communautés à risque.
Si les activités volcaniques, séismes, et phénomènes météo sont relativement bien surveillés, la majeure partie de l’activité volcanique mondiale est dissimulée sous l’eau. « Ces volcans représentent 80 % de l’activité volcanique mondiale », indique l’Unesco. La mission d’exploration « Unesco – 1 Ocean », conduite aux îles éoliennes, en Italie, par l’explorateur et photographe Alexis Rosenfeld, vise ainsi à approfondir les connaissances sur ces volcans et leur incidence sur le développement des tsunamis en Méditerranée.
Aperçu du système volcanique sous-marin en activité aux îles éoliennes. Crédit : Alexis Rosenfeld / 1 Ocean UNESCO
Les phénomènes produits par ce système volcanique situé à plus de soixante-dix mètres sous la surface, sont surveillés quotidiennement par l’équipe du professeur Francesco Italiano, responsable de la section de Palerme de l’Institut National de Géophysique et de Volcanologie (INGV). Ces équipes « ont noté une instabilité » qui pourrait annoncer la survenue d’un « événement majeur ».
« Nous estimons que, selon un cycle naturel, il y a une grande explosion dans cette zone tous les 70 ans. Or, la dernière a eu lieu à la fin des années 1930. [En cas d’explosion] l’un des risques est la formation d’un tsunami. Il s’agit d’un phénomène qui se déplace à très grande vitesse, au minimum à 300 km/h. Il pourrait donc frapper les îles en quelques minutes, ce qui implique de réagir très rapidement », commente Francesco Italiano.