L'Espagne utilise une surtarification saisonnière pour économiser l'eau. Crédit : AdobeStock.
L’étude menée par l’Office International de l’Eau (OiEau) pour la Métropole de Limoges vise à fournir une vue d’ensemble des cadres politiques des services d’eau, et à détailler le fonctionnement de quelques systèmes de tarification en Europe. L’objectif final est d’identifier les modèles susceptibles d’être utilisés dans un contexte français.
Limoges Métropole se positionne pour devenir un des premiers territoires en transition hydrique d’Europe, intégrant ainsi le réseau mondial des « Water sensitive cities ». En charge du service d’eau potable et d’assainissement de près de 200.000 personnes, la métropole est confrontée à une forte réduction de la consommation d’eau par habitant depuis vingt ans. La baisse des revenus qui en résulte peut affecter l’évolution du prix de l’eau pour les usagers. La collectivité doit donc trouver des mécanismes pour allier efficacité hydrique privilégiant une moindre consommation et maintien de tarifs acceptables pour l’usager.
Gestion et financement des services d’eau européens Pour alimenter la réflexion, cette étude compare les pratiques de sept pays européens : France, Irlande, Pays-Bas, Roumanie, Allemagne, Espagne et Lettonie. Elle s’appuie sur une prospection bibliographique et de nombreux échanges avec des experts nationaux et européens, et des organisations administrative et institutionnelle du domaine de l’eau. Les résultats obtenus permettent de synthétiser les pratiques européennes dans la gestion et le financement de leur service d’eau, utiles pour le cas français. Les modèles observés peuvent répondre à la problématique de perception de revenus pour assurer le fonctionnement et le renouvellement des infrastructures dans un contexte de baisse de la consommation.
Plusieurs leviers peuvent être actionnés • Le premier porte sur les volumes d’eaux pluviales collectés. L’enjeu actuel est de désimperméabiliser les parcelles pour éviter les rejets dans les réseaux. Ces méthodes (toits verts, noues, surfaces perméables…) sont notamment valorisées en Allemagne et aux Pays-Bas en appliquant un calcul des surfaces contributives aux volumes d’eau pluviale et une réduction du coefficient d’imperméabilisation appliqué pour ces surfaces qui permet une réduction du tarif. Une alternative peut être d’apporter des financements spécifiques pour l’installation de ces dispositifs. • Le deuxième levier est une surtarification saisonnière et/ou pour « gaspillage » Un tarif saisonnier pourrait être mis en place pour limiter les consommations dans les périodes de stress hydrique. Utilisé en Espagne au cours de la période estivale du 1er juin au 30 septembre, ce tarif a pour objectif d’encourager l’utilisation rationnelle de l’eau. Cela implique une modification de la fréquence de comptage ou l’instauration d’un comptage permanent (compteurs connectés). En outre, une consommation annuelle dépassant les besoins courant pour l’hygiène et l’alimentation pourrait être facturée selon un barême de tarification incitatif. Cette approche n’a pas été observée dans les pays audités, mais fait partie de l’actualité française vis-à-vis des débats sur les piscines. • Le troisième est une prise en compte des caractéristiques du logement. Le tarif dépend dans ce cas de la « composition » de l’habitation : surface, présence d’une baignoire et/ou douche, nombre de sanitaire… Elle est notamment utilisée aux Pays-Bas. Ces caractéristiques peuvent être approchées plus simplement par la valeur foncière, qui a été utilisée jusque récemment en Irlande pour le financement des services d’eau. • Le quatrième est un conditionnement à la taille ou au type du compteur. Cette méthode est utilisée en Allemagne où la part fixe dépend de la taille du compteur installé ce qui permet de différencier les immeubles de logements collectifs et autres usagers importants, la part variable étant une tarification classique au mètre cube. • Le cinquième levier est d’établir une part fixe en fonction du nombre de membres composant la famille domicilié dans le logement et indépendante de la taille du logement ou de la consommation réelle d’eau, comme c’est le cas notamment aux Pays-Bas et en Irlande. Elle peut aussi être basée sur une consommation minimum forfaitaire par catégorie d’usager comme en Espagne, ou identique pour chaque abonné comme en France. • Le sixième consiste en un forfait de prestations et/ou frais pour différents services rendus aux abonnés : ouvertures/fermetures de compteurs ; modification, déplacement ou suppression de connexion; location de compteurs… Les différents modèles identifiés, à partir de cette étude peuvent contribuer à la réflexion sur les principes de tarification. Le choix du futur modèle de tarification par Limoges Métropole en tirera les enseignements.