Annoncée cette semaine, la nouvelle norme de construction des bâtiments (RE2020) suscite l’inquiétude chez plusieurs organisations et associations du secteur du gaz et, au contraire, un certain engouement chez ceux qui comptent sur l’électricité pour rendre les bâtiments plus efficaces énergétiquement.
La norme RE2020, dont les contours ont été précisés cette semaine par les ministres Barbara Pompili et Emmanuelle Wargon, n’a pas plu à tout le monde. Et pour cause : le gaz semble pour l’instant écarté, et l’injection de gaz renouvelable dans le réseau des nouveaux bâtiments n’est pas une priorité. « Tout l’intérêt du gaz renouvelable est de remplacer le gaz non-renouvelable qui alimente le bâti existant. Le biogaz a beaucoup d’avenir devant lui. Mais d’abord faisons en sorte qu’il puisse remplacer le gaz naturel. », soutenait la ministre de la Transition écologique.
L’accueil est morose chez les pro-gaz : l’association Énergies et Avenir regrette « l’exclusion, à très court terme, du gaz dans la construction neuve de logements individuels. » Elle fait valoir que « la filière s’est engagée de longue date dans la recherche et le développement d’équipements fonctionnant au biogaz, à l’hydrogène et plus largement au gaz « vert ». L’Association française du Gaz « se félicite de la volonté de mettre fin au chauffage électrique par effet joule, [mais attend] des précisions quant aux critères permettant de l’exclure. » Elle regrette l’annonce du gouvernement : « Alors que le réseau de gaz naturel sera de plus en plus renouvelable à horizon 2050, le gouvernement fait fi des gaz renouvelables pour les logements neufs. »
Déséquilibre
Au contraire, la décision réjouit l’association Équilibre des Énergies, plutôt pro-électricité. « Il était plus que temps de remédier au déséquilibre introduit par la RT 2012 qui avait permis au gaz de conquérir 75 % du marché des logements neufs », indique-t-elle dans un communiqué. Elle salue le choix d’abaisser de 30% le seuil du besoin bioclimatique (Bbio) ; cela « apparaît comme une bonne option pour faire émerger un parc de qualité qui pourra être légué aux générations futures. » L’association Coénove pour qui les annonces ont laissé « un goût amer » estime que « le niveau de baisse annoncé interpelle sur les surcoûts à la construction auxquels devront faire face les maîtres d’ouvrage, d’autant plus dans le contexte actuel de crise économique du secteur. »
Son président Bertrand Aulagne regrette la non-prise en compte du gaz renouvelable, « alors même que le dispositif Méthaneuf a été présenté à l’Administration il y a déjà plus d’un an et qu’il répond tant aux objectifs de décarbonation que de développement de chaleur renouvelable additionnelle. » Au contraire, pour l’association Équilibre des Énergies, les solutions carbonées pourraient contourner les obligations de la RE 2020 en achetant des certificats d’origine de biométhane en passant, justement, par Méthaneuf. « Cette dérogation serait en totale contradiction avec le renforcement de l’exigence climatique car dans la réalité, les logements construits grâce à Méthaneuf resteront alimentés par gaz fossile pour plusieurs décennies. », estime-t-elle.
L’association Équilibre des Énergies se montre cependant critique envers « le nouvel indicateur de la RE 2020, appelé « Cep non renouvelable », [qui] ne prend pas en compte les apports renouvelables véhiculés par le réseau ce qui revient à pénaliser l’électricité décarbonée dont une part importante, environ un quart, est produite par les barrages hydrauliques, les champs éoliens et photovoltaïques. » Pour l’association Coénove, c’est l’absence de précision sur sa valeur retenue qui pose un problème.
Le Syndicat des énergies renouvelables, lui, « salue les orientations ambitieuses de la future réglementation environnementale 2020, socle de la neutralité carbone dans le secteur du bâtiment neuf. » et accueille avec enthousiasme la volonté de recourir davantage au bois et aux matériaux biosourcés pour la construction. « Seule déception, la prise en compte limitée de l’électricité solaire produite sur les bâtiments neufs qui ne permettra pas d’accélérer le développement des technologies de réseaux intelligents. » En effet, seule l’autoconsommation solaire serait prise en compte, et non l’électricité produite pour être revendue.