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ÉNERGIE

[Tribune] Objectif neutralité carbone en 2050 : le rôle clé des nouvelles énergies

PUBLIÉ LE 25 DÉCEMBRE 2020
ROMAIN BAILLY, CONSULTANT MC2I
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[Tribune] Objectif neutralité carbone en 2050 : le rôle clé des nouvelles énergies
Romain Bailly
Romain Bailly, consultant au cabinet de conseil en transformation numérique mc2i, revient sur le rôle croissant des énergies renouvelables dans la transition bas-carbone française, et revient sur l’importance de mettre aussi en valeur l’efficacité énergétique. 

Avec 30 milliards d’euros de dépenses allouées au volet « Ecologie », la transition écologique est présentée comme un pilier du plan France Relance dévoilé en septembre dernier. Transport, industrie, bâtiment : les investissements annoncés s’inscrivent dans l’objectif de neutralité carbone en 2050, énoncé dans la Stratégie Nationale Bas Carbone. En complément des leviers de sobriété et d’efficacité énergétique, le déploiement à grande échelle de nouvelles sources d’énergie sera capital.

L’électrification de l’économie française : une étape indispensable

Avec une production électrique peu carbonée (moins de 70g eqCO2/kWh), la France dispose d’un atout exceptionnel pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre. La feuille de route de la SNBC table donc sur une électrification totale de la voiture, des usages du secteur résidentiel hors chauffage et d’une part des procédés industriels, faisant grimper le besoin en électricité à 650 TWh par an (+20% vs 2019).

Avec près de 70% d’énergie finale d’origine fossile et une volonté politique de réduire le parc nucléaire, de nouvelles sources d’énergies renouvelables doivent être exploitées. Parmi elles, l’éolien a un rôle clé à jouer. Soutenu par des tarifs d’achat garantis, il présente désormais des coûts compétitifs qui ont accéléré son déploiement (16,5 GW installés d’après RTE). Si l’éolien terrestre souffre d’une intermittence trop importante, la production offshore pourrait répondre à cet écueil dans la décennie à venir selon l’AIE, à condition de rogner des coûts d’installation encore prohibitifs. Autre technologie clé, le solaire photovoltaïque offre actuellement une capacité de 9,4 GW. Mais cette énergie reste peu en phase avec le profil de consommation français (forte demande l’hiver en soirée), et affiche des coûts et un facteur de charge moyen peu compétitifs. 

Le caractère intermittent de ces deux sources contraint le système électrique à s’adapter. Afin de répondre à la demande, une base pilotable bas carbone se révèle indispensable pour maintenir un équilibre du système. Le nucléaire et l’hydroélectrique conserveront dans ce cadre un rôle crucial, à condition d’assurer le renouvellement et la maintenance des parcs. En complément, il faudra produire des infrastructures de stockage à grande échelle pour pallier le surdimensionnement nécessaire des moyens de production. L’usage des STEP, les progrès rapides sur les batteries et recharges intelligentes, ou encore le stockage via l’hydrogène sont autant de débouchés aux surplus temporaires de production. Au niveau européen, une stratégie de foisonnement d’envergure (pour lisser la production) et une meilleure adaptabilité et résilience des réseaux (pour faciliter les effacements au niveau continental) constituent le second pilier indispensable à l’extension des EnR. Les régions de leur côté peuvent s’appuyer sur les SRADDET, qui déclinent les objectifs de la SNBC au niveau local, afin de planifier la stratégie de déploiement des EnR sur leurs territoires. 

Des techniques prometteuses pour remplacer les énergies carbonées résiduelles

D’autres techniques et énergies doivent être envisagées pour remplacer l’énergie carbonée restante, notamment dans le secteur des transports : l’hydrogène est une alternative souvent citée. S’il est combiné à de l’oxygène dans une pile à combustible, de l’électricité est produite en temps réel pour faire rouler un véhicule. Cette solution garantit zéro émission de CO2 dans le cas où le processus d’électrolyse est généré par une électricité bas carbone. Néanmoins, la technologie n’en est aujourd’hui qu’à ses balbutiements en raison notamment de son coût de production élevé. Gaz de faible densité, son stockage est certainement trop volumineux pour l’aviation ou l’automobile. C’est une solution néanmoins pertinente pour décarboner la logistique lourde (poids lourds, cargos) qui ne peut embarquer des batteries géantes et longues à charger. 

Le développement des biocarburants, carburants issus de la biomasse peu carbonés, promet de remplacer progressivement le pétrole fossile importé, facteur d’émissions majeur. Actuellement issus de matières végétales, leur production entre en concurrence directe avec les cultures alimentaires. Les alternatives de 2ème et 3ème génération pourraient constituer une option appropriée pour remplir les réservoirs de l’aviation et des véhicules lourds, tout en réduisant le besoin en maintenance.
Pour remplacer les importations de gaz naturel, une production locale de biométhane présente des avantages indéniables en termes d’emplois et d’indépendance énergétique. Issu de la méthanisation de déchets agricoles et industriels, il émet 10 fois moins de CO2 que le gaz fossile et permet ainsi d’accompagner la hausse de la demande d’électricité et la décarbonation des secteurs résidentiels et tertiaires, responsables de 25% des émissions.  

Pour compléter, l’usage du bois, de la biomasse et des pompes à chaleur, plutôt que du gaz naturel et du fioul, améliorera le bilan carbone de la production de chaleur, tout en présentant des rendements énergétiques supérieurs à l’électricité. La systématisation de la récupération de chaleur fatale devrait aussi être prioritaire, dans l’industrie et sur les lieux de production d’énergie où les pertes peuvent être majeures (production nucléaire notamment).

Efficacité et sobriété énergétiques restent cependant inéluctables

Si de nombreux leviers existent effectivement pour réduire les émissions de CO2 françaises, les défis industriels et politiques sous-jacents sont considérables. Dans un monde où croissance économique et demande énergétique restent fortement liés, il paraît peu probable que l’objectif de neutralité carbone pour 2050 puisse être atteint en faisant l’impasse sur la compensation carbone. Une stratégie de découplage entre PIB et énergie est indispensable, et pousse à revoir de nombreux pans de l’économie nationale sous le prisme non seulement de l’efficacité énergétique, mais aussi de la sobriété.
 
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