Ce lundi 20 mai, l’association française des Entreprises pour l’environnement (EpE) a présenté les résultats d’une étude sur la possibilité d’une France à zéro émission nette à l’horizon 2050. D’après ces grandes entreprises, l’objectif de neutralité carbone est réalisable à plusieurs conditions.
« La neutralité carbone est atteignable à l’horizon 2050, mais elle implique une transformation profonde des modes de vie et de consommation », annonce ce lundi 20 mai Jean-Dominique Senard, président de l’association Entreprises pour l’environnement (EpE) et président de Renault. Pour arriver à ce constat, EpE a conduit une étude intitulée ZEN 2050 - pour « zéro émission nette » - dont les résultats viennent d’être publiés. Cette étude de faisabilité a été menée par 27 entreprises de l’association, avec l’appui d’experts tels qu’Enerdata, Carbone 4, Solagro, le Cired ou encore le sociologue membre du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec), Stéphane Labranche.
Moins 4,5% d’émissions carbone par an
« Après avoir dressé un état des lieux, nous avons tenté de concevoir ce que pourrait être la France en 2050, quels seront les modes de vie, ou comment pourront être constitués les puits de carbone », explique Jean-Dominique Senard. Les entreprises se sont mises d’accord sur l’atteinte d’un objectif à l’horizon 2050 : ramener à 100 millions de tonnes de CO2 équivalent, les émissions annuelles françaises. « En 2015, elles étaient de 480 millions de tonnes de CO2 équivalent, ce qui reviendrait à diminuer nos émissions de 4,5% chaque année jusqu’en 2050 », précise le président de l’association.
En établissant 14 recommandations, EpE « prouve que la neutralité carbone française est possible et qu’elle est compatible avec la croissance économique et des modes de vie diversifiés », se félicite Jean-Dominique Senard. Il s’agirait de diminuer de 50% les émissions de l’agriculture, de 70 à 90% celles de l’industrie et de 90% celles du bâtiment et des transports. « Ce n’est pas irréaliste car les technologies existent déjà », soutient le président de l’association. Parmi les autres objectifs : diminuer de 50% la consommation finale d’énergie, recycler 80% des déchets, ou encore diviser par deux l’artificialisation des sols.
100 milliards d’euros d’investissements annuels pour la transition
« Nous avons identifié 14 recommandations dans quatre grands volets », explique Jean-Laurent Bonnafé, futur président d’EpE (dès fin mai prochain) et administrateur directeur général de BNP Paribas. « Il faut tout d’abord d’intégrer la notion de climat et de ses enjeux dans l’inconscient collectif, car l’idée de transition évoque des petits pas, quand en réalité, une transformation fondamentale est nécessaire », explique-t-il. Pour améliorer la connaissance des enjeux climatiques, EpE préconise d’éduquer les jeunes générations, ou encore d’intégrer la problématique du climat dans les campagnes de publicité. « Le deuxième volet concerne la transformation du cadre économique », poursuite Jean-Laurent Bonnafé : « il s’agit de nouer un dialogue international et par exemple, de conditionner l’accès au marché économique européen à des engagements pour le climat », explique-t-il, mais également d’instaurer une fiscalité transparente et équitable pour la transition écologique. « L’investissement pour la transition devra progressivement passer de 30 milliards d’euros par an à 75 milliards d’euros, puis à 100 milliards d’euros en 2050 », martèle enfin le directeur général de BNP Paribas.
Le troisième volet de recommandations d’EpE est consitué de mesures sectorielles, parmi lesquelles on trouve notamment la rénovation des logements et des bâtiments tertiaires, le développement des véhicules électriques et des infrastructures de recharge, ou le développement de l’économie circulaire dans l’industrie. Enfin, un certain nombre de mesures concerne l’agriculture et l’alimentation. « Nous recommandons d’accompagner une transition agroécologique afin de diviser par deux les émissions du secteur, de développer la quantité et les usages de la biomasse, ou encore de modifier les habitudes alimentaires, en divisant par deux l’apport en protéines animales », détaille Jean-Laurent Bonnafé.
Vers un cadre réglementaire incitatif
« Pour que tout cela soit possible, il est nécessaire que les sphères industrielle, politique et citoyenne soient solidaires et agissent ensemble », estime Jean-Dominique Senard. « Le monde politique doit fournir un cadre réglementaire et définir une fiscalité équitable : il faut rendre la transition écologique incitative et non punitive », poursuit-il. Quant aux industriels, « ils doivent être incités à la transformation et investir dans l’innovation et les solutions », conclut Jean-Laurent Bonnafé.