Des « progrès évidents » selon EcoAct. Un « bilan peu reluisant » pour l’Observatoire des multinationales. Les mêmes documents publiés par les entreprises du CAC 40 suscitent deux lectures diamétralement opposées.
« Pas besoin d’aller en Pologne pour traiter la question climatique : il y a des marges d’amélioration en France », ironise la directrice du département technique d’EcoAct, Adrianna De Toni, en présentant le rapport 2019 sur « la performance en matière de reporting climat » des entreprises du CAC401.
La neutralité carbone ignorée par 42 % des entreprises
Seules Atos et BNP-Paribas (5 % des 40 valeurs de l’indice français) atteignent la neutralité carbone contre 8 % des 100 valeurs de l’indice britannique FTSE, selon le document publié le 25 septembre par la société de conseil en stratégie climatique. Au total, dix entreprises du CAC (25 %) sont dotées d’une stratégie de neutralité carbone à horizon 2050 (15 pour le FTSE et 14 parmi les 35 valeurs de l’IBEX espagnol soit 40 %). « Une perspective trop lointaine, qui n’intègre pas l’urgence climatique », juge Armand Doré, directeur général du cabinet. 42 % ne font aucune mention de cet objectif.
Autre axe de progrès : le recours aux énergies renouvelables (ENR). Le CAC 40 est le seul des quatre indices étudiés à ne compter aucune entreprise s’approvisionnant exclusivement en ENR (contre 10 % des 30 valeurs du Dow Jones). Un petit quart (22,5 %) vise le 100 % ENR en 2050. « On sait que ce n’est pas assez », note Adrianna De Toni.
Des scores variant d’un facteur 3
Reste que le CAC 40 ressort, pour la troisième année consécutive, en tête des indices boursiers, avec une moyenne de 61 % de conformité à la soixantaine de critères étudiés. Il pointe au premier rang pour les objectifs de réduction d’émissions de gaz à effet de serre (83 % des entreprises s’en sont fixé), en particulier ceux conformes aux recommandations scientifiques (Science-Based Targets (SBT), 36 % soit deux fois plus qu’en 2018). Les deux-tiers (67 %) des entreprises engagées sur une trajectoire SBT sont en passe d’atteindre leur objectif.
Si les résultats des cinq entreprises de tête sont très proches, ils varient globalement de 86,2 % (Danone) à 26 %.
Et des analyses discordantes
Ce tableau globalement flatteur contraste avec celui de l’Observatoire des multinationales, récemment publié par le média en ligne Basta : de 2016 à 2018, seules 13 entreprises du CAC 40 ont réduit leurs émissions et Danone, n°1 selon EcoAct (et n° 2 mondial, à un point d’Unilever) les a augmentées de 20 %. L’Observatoire pointe une hausse des rejets carbonés de 60 % chez PSA, classé au 9è rang (avec une note de 75 %) par EcoAct. Quant au n°2 du palmarès du cabinet, BNP Paribas (score de 84,9 %), l’Observatoire le qualifie de « l’un des principaux pourvoyeurs de fonds aux énergies sales ». EcoAct place au sixième rang Engie (75,7 %), dont l’Observatoire estime que la cession d’actifs dans le charbon depuis 2015 en a réduit la part dans le mix de l’entreprise (de 15 % à 4 %) mais pas les émissions, les centrales ayant juste changé de propriétaire.
L’association Notre affaire à tous publiera, en octobre, son propre benchmark des performances climatiques des entreprises du CAC 40.
1 : réalisé à partir des documents publics des entreprises (rapport intégré, rapport développement durable, site internet), évalués au regard de 61 critères dans quatre champs : mesure et rapports ; stratégie et gouvernance ; objectifs et réduction ; engagement et innovation.