Nathalie Coste, Directrice et Fondatrice de LoveBrands. Crédit : DR
« Consommer est inévitable, mais nous avons des choix à faire : mieux consommer, voire déconsommer pour certains ». Pour éviter une déprime écologique, « nous devons absolument militer pour une action coordonnée par les industriels et les marques », souligne Nathalie Coste, Directrice et Fondatrice de LoveBrands.
S’il est facile de blâmer les consommateurs pour l’urgence climatique et l’état de la planète, une certaine fatigue des consommateurs s’installe sur les sujets autour de l’écologie, pour qui la part d’actions ne semble qu’une goutte dans l’océan, face aux promesses des industriels et grandes marques - quantitativement les plus pollueurs -, au greenwashing qui érode la confiance, aux indications sur les emballages impossibles à suivre, aux labels peu clairs…
Pour éviter une “déprime écologique”, nous devons absolument militer pour, non pas une remise en cause des consommateurs, mais une action coordonnée par les industriels et les marques et des scénarios “en crabe”, afin de faciliter des changements de comportements vers un monde meilleur.
Le dilemme consommateur
Il y a un fossé entre ce que les consommateurs ont envie de faire et ce qu’ils font en réalité : beaucoup aimeraient fondamentalement faire plus, en pensant à l’avenir de leurs enfants ou en percevant directement les changements climatiques. Nous ne sommes plus à l’heure de douter qu’il faille agir mais il est difficile, pour la plupart, d’accepter la pression écologique qui pèse sur leurs épaules. Il y a, en effet, une myriade de raisons pour lesquels les consommateurs n’adoptent pas des comportements plus écologiques : le prix, en période de crise, arrive comme une des raisons les plus évidentes, mais aussi de nombreux consommateurs n’ont pas la conviction que l’alternative dite écologique remette en question son impact.
Nous sommes donc face à une complexification de l’évaluation de l’impact environnemental, parfois difficile à juger, voire flou. Et, alors que le sujet se complexifie, le consommateur a besoin de plus de temps et d’information pour des choix raisonnés. Ensuite, il y a de nombreux compromis à faire : le développement durable est source d’arbitrage mais rarement la raison d’être d’un produit, cette considération vient alors s’ajouter à d’autres, plus importantes au quotidien.
L’exemple des labels Bio
En théorie, il y une confiance tacite dans le label bio, puisqu’il est délivré par une autorité respectable et contrôlée mais cette confiance s’érode au fil du temps. Tout d’abord, il y a manque de connaissance de la définition du label sur les différentes catégories de produits. Ensuite, l’avantage du bio est de plus en plus relativisé – Est ce bien d’acheter un avocat bio mais qui vient du Pérou ? Est-ce que les pesticides ne se transmettent pas d’un champ à un autre ? Est-ce que l’eau utilisée est saine ? Est-ce qu’acheter local n’est pas mieux que bio ? Les consommateurs prennent en compte de plus en plus de facteurs, tant qu’ils finissent par se perdre dans l’intégration de choix écologiques.
Également, chacun à son niveau, à géométrie variable, nous sommes tous de plus en plus écologiques et faisons des choix plus durables lorsque l’opportunité se présente. Nous voyons ainsi émerger des comportements hybrides, où le consommateur, flexitarien, valide le “mieux mais moins souvent”, l’ultra-frais végétal ou animal, etc.
Un soulèvement face au greenwashing
Si la relation à la grande distribution est en plein bouleversement, avec l’achat direct aux producteurs et les circuits courts privilégiés, devons-nous encore parler de “consommateurs” – une vision consumériste limitant l’individu à une fonction par définition polluante, au détriment de la planète ?
Aujourd’hui, consommer est inévitable, mais nous avons des choix à faire : mieux consommer, voire déconsommer pour certains, et main dans la main avec des industriels prenant en compte la collectivité et l’environnement. Les consommateurs, plus aguerris au marketing que jamais, sont devenus très forts pour détecter le greenwashing, même s’ils reconnaissent aussi que les industriels ne peuvent pas tout faire tout de suite et que les améliorations sont progressives. Ainsi, de nombreux consommateurs sont à la recherche de marques intègres, construites dans la durée par un discours clair, cohérent, et surtout par de l’action.
Comment les industriels doivent-ils aider les consommateurs ?
Pour aider les consommateurs à faire les meilleurs choix, il faut comprendre que la motivation principale de consommation n’est pas le développement durable, les industriels doivent donc accompagner vers des solutions plus responsables, tout en levant les freins qui y sont liés.
Nous ne sommes qu’au début d’une nouvelle ère : la notion de développement durable doit être affinée par les industriels et celle-ci doit prendre de la granularité avec des notions nouvelles - comme celle de l’économie circulaire, par exemple. Pour démocratiser les produits plus durables, les rendre visibles et facilement accessibles, ils doivent rendre leurs discours transparents et lever le voile sur des attitudes problématiques, envers leurs consommateurs, en arrêtant les demi-vérités et le jeu avec la confiance, pour ne plus risquer de l’entériner.