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POLLUTIONS

[Tribune] Gaz réfrigérants : le gigantesque marché noir qui compromet les objectifs de neutralité carbone de l’UE

PUBLIÉ LE 30 NOVEMBRE 2020
MÉLANIE JOURDAIN, PORTE-PAROLE DE L’EFCTC (COMITÉ TECHNIQUE EUROPÉEN SUR LE FLUOROCARBONE)
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[Tribune] Gaz réfrigérants : le gigantesque marché noir qui compromet les objectifs de neutralité carbone de l’UE
Mélanie Jourdain, porte parole du Comité technique européen sur le fluorocarbone, alerte sur la contrebande des hydrofluorocarbures, qui pourrait mettre en péril les objectifs climatiques de l’Union européenne.

Les objectifs climatiques de l’UE visent à réduire leur utilisation de 79% d’ici 2030 et à les remplacer progressivement par des gaz réfrigérants ayant un impact moindre sur le réchauffement climatique. Mais un marché parallèle illégal de contrebande entrave ces ambitions, constitue une menace majeure pour l’environnement et la sécurité et finance la criminalité organisée.

Le Comité technique européen sur les fluorocarbures (EFCTC) tire la sonnette d’alarme et invite toute la chaîne de valeur des gaz réfrigérants à se mobiliser et respecter les engagements climatiques.

Les hydrofluorocarbures (HFC) sont un groupe de gaz à effet de serre réfrigérants très puissants. Nous ne le savons pas et pourtant ils font partie de notre vie quotidienne. On les trouve dans les systèmes de réfrigération comme les vitrines frigorifiques de supermarchés, dans les systèmes d’air climatisé des hôtels, des parkings, des hôpitaux, des bureaux mais aussi dans la climatisation des voitures et dans les pompes à chaleur. Ils sont aussi utilisés pour fabriquer des mousses, des solvants, des extincteurs à incendie et des aérosols.

Pour résoudre ce problème, l’UE a introduit un système de quotas pour les producteurs et les importateurs, en 2015 dans le cadre de la réglementation F-Gas, qui vise à réduire de 79% l’utilisation des HFC d’ici 2030 et à encourager une transition progressive vers des solutions alternatives. La nouvelle politique porte déjà ses fruits. En 2018, la consommation officielle de HFC a diminué de 37% en Europe, et était inférieure de 46% à l’objectif fixé par le protocole de Montréal pour 2019. Dans le secteur automobile, la transition vers des gaz HFO sans gaz à effet de serre est déjà effective sur la climatisation de tous les nouveaux véhicules mis sur le marché européen depuis janvier 2020.

Cependant, ce système européen de quotas, qui n’a pas d’équivalent dans le monde, mais qui est essentiel pour réaliser cette transition, a également un contre-effet : il encourage la contrebande. Ainsi, un inquiétant marché noir des importations illégales d’hydrofluorocarbures (HFC) s’est développé en Europe et ne cesse de croître.

Un tiers des volumes importés en Europe seraient illégaux

Les derniers chiffres publiés par le cabinet de conseil Oxera, analysés par l’EFCTC, sont alarmants : les importations illégales en 2018 pourraient atteindre 34 millions de tonnes équivalent de CO2, soit un tiers des volumes importés autorisés. En termes d’émissions, cela correspondrait à ajouter 25 millions de véhicules sur les routes européennes chaque année, soit l’équivalent du parc automobile de l’Espagne. Et ce n’est que la partie immergée de l’iceberg ! Selon la même source, les gaz illégaux proviendraient principalement de Chine et transiteraient par plusieurs pays comme l’Ukraine, les pays baltes, la Croatie ou la Turquie. Par manque de formation adéquate, les douaniers ne savent pas comment identifier ces produits frauduleux qui passent à travers les contrôles aux frontières et qui sont écoulés le plus souvent via le e-commerce.

Selon un rapport établi par le cabinet Kroll, 228 cas de fraude ont été dévoilés entre mars et décembre 2019. L’essentiel du trafic identifié concerne des bonbonnes à usage unique (interdites sur le marché européen depuis 20017) qui ont été essentiellement vendues sur des plateformes en ligne, comme eBay, OLX et MarktPlaats.

Des risques majeurs pour toute la chaine de valeur

Il ne s’agit pas ici d’un crime sans victime. Les produits illégaux qui inondent le marché européen financent le crime organisé, menacent de nombreuses PME déjà en difficulté en raison de la pandémie actuelle, et génèrent un manque à gagner de TVA non-perçue par l’Etat. Les pertes de revenus du commerce légal épuisent de surcroît les budgets en recherche et développement, ce qui entrave la capacité de l’industrie à accélérer le développement de solutions de réfrigération nouvelle génération.

En outre, ces gaz importés illégalement n’étant pas contrôlés, leur composition n’est pas garantie et leur utilisation peut présenter aussi certains risques tant sur rendement des machines frigorifiques, sur le vieillissement prématuré, sur la dégradation des équipements, que pour la santé des professionnels qui interviennent au contact de gaz à la composition parfois douteuse.

Le constat est lourd. Le danger est là. Il appartient à chaque acteur de la chaine de valeur, fabricant, revendeur, installateur, réparateur, organisme de contrôle, syndicat professionnel, Fédération d’agir à son niveau pour endiguer ce marché noir et signaler toute transaction frauduleuse.
Si l’éradication du marché noir dépend d’une application stricte de la loi et de mesures prises par les autorités dans toute l’UE, elle dépend également de la vigilance et de la coopération de tout acteur de la chaine de valeur lorsqu’il achète, entretient ou vend des HFC. Une enquête menée par l’ONG internationale The Environmental Investigation Agency (EIA) a révélé que 83% de tous les acteurs de la chaîne de valeur des réfrigérants sont au courant du commerce illégal des HFC et que 72% se sont déjà vu proposer des bouteilles jetables.

Sans cet engagement collectif nous risquons de ne pas être en mesure d’atteindre les objectifs de l’Union européenne d’être neutre sur le plan climatique d’ici 2050. Alors rejoignons la lutte #SayNoToIllegalHFCs et les 220 organisations qui se sont déjà engagées.
Mélanie Jourdain, porte-parole de l’EFCTC (Comité Technique européen sur le fluorocarbone)
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