Le numérique a un impact environnemental considérable et sa croissance continue pourrait tripler son empreinte carbone à l’horizon 2050. C’est le résultat de l’étude prospective menée par l’Agence de la transition écologique (Ademe) et l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (Arcep) et remise aux ministres de l’Économie, de la Transition écologique, de la Transition énergétique et de la Transition numérique. Les organismes tirent la sonnette d’alarme et appellent à des mesures de sobriété numérique.
Après la publication en 2022 des deux premiers volets de leur étude évaluant l’impact actuel du numérique dans son ensemble, les deux organisations ont remis, le 06 mars, à Bruno Lemaire, ministre de l’Economie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et Numérique, Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Agnès Pannier Runacher, ministre de la Transition énergétique et Jean-Noël Barrot, ministre délégué chargé de la Transition numérique et des Télécommunications, le troisième et dernier volet portant sur l’évaluation prospective de l’impact environnemental du numérique en France, à horizon 2030 et 2050. Résultat : Si la croissance du numérique continue sans mesure de sobriété numérique, le trafic de données serait multiplié par 6 et le nombre d’équipements serait supérieur à près de 65 % en 2030 par rapport à 2020. L’empreinte carbone liée aux usages du numérique pourrait ainsi tripler d’ici à 2050.
Les conséquences d’un tel scénario sont inquiétantes. Le rapport prévoit notamment une augmentation de 45 % de l’empreinte carbone du numérique en France, une consommation de ressources abiotiques (métaux et minéraux) en hausse de 14 %, et une consommation électrique finale en phase d’usage augmentée de 5 % (pour atteindre 54 TWh par an).
Sobriété et reconditionnement
Pour limiter cette empreinte, des leviers d’action ont été identifiés. Pour l’Ademe et l’Arcep, la priorité est à la sobriété numérique. Une telle politique nécessite de limiter le développement de nouveaux produits ou services numériques, de réduire ou de stabiliser le nombre d’équipements, et d’allonger la durée de vie des terminaux en soutenant le reconditionnement et la réparation des produits usagés.
Crédit : Ademe
La sensibilisation des consommateurs et l’écoconception des équipements sont également des axes majeurs de travail sur lesquels les deux organismes misent pour limiter l’impact de ce secteur. Si ces leviers sont mis en place, l’empreinte carbone du numérique pourrait être réduite de 16 % d’ici à 2030.
Vers un quintuplement de l’empreinte carbone du numérique ?
L’Ademe a également appliqué son exercice « Transition(s) 2050 » – dans lequel quatre scénarios ont été élaborés pour parvenir à la neutralité carbone – au secteur du numérique. Parmi les modèles étudiés, l’agence utilise le « Pari réparateur », une société qui continuerait à fonctionner comme elle le fait actuellement en s’appuyant sur les technologies pour gérer et réparer les systèmes sociaux et écologiques. D’après l’Ademe, cette approche exclusive basée sur les technologies risque d’entraîner une augmentation considérable de l’empreinte carbone du numérique, qui pourrait être multipliée par cinq par rapport à 2020. Cette croissance pourrait être due à l’utilisation accrue de technologies énergivores pour l’internet des objets et la 5G.
Crédit : Ademe
En revanche, le scénario « Génération frugale » offre une approche différente. Ce modèle suppose des transformations importantes dans les modes de consommation, notamment en matière de déplacement, de chauffage, d’alimentation et d’utilisation des équipements. Grâce à des changements comportementaux, organisationnels et technologiques, ce scénario permettrait de diviser par deux l’empreinte carbone du numérique par rapport à 2020, et ce, sans impliquer de « technologies de captage et de stockage de carbone non éprouvées à grande échelle ».