Selon la provenance et la nature des déchets récupérés, les étapes de tri sont plus ou moins nombreuses et laborieuses. Les déchets issus de la collecte des ménages et assimilés, majoritairement mélangés aux autres emballages, ne sont donc pas les plus simples à traiter. « Lorsque les papiers-cartons arrivent en centres de tri, la première chose à faire est de retirer les gros cartons de formats supérieurs à 40 ou 50 cm », explique Thierry Oudart, créateur d'Eurecka, en Champagne, un bureau d'études et de conseil pour les collectivités, les fabricants de matériel, etc. (qui a collaboré avec Hofmann group à la refonte du centre du Smetrall, lire Utilisateurs) et expert auprès de l'Ademe sur le vaste chantier de la modernisation des centres de tri. « Dans de nombreux cas, cette opération de prétri est encore réalisée manuellement. Mais les centres les plus importants en termes de capacité et de débit ou les sites qui ont beaucoup de cartons à traiter, du fait d'une collecte sélective englobant les emballages des artisans et des commerçants par exemple, sont équipés de décartonneurs », explique-t-il. Ce terme générique désigne différents séparateurs mécaniques réservés à cette tâche. Techniquement, il existe trois grands types de décartonneurs : les trommels, les cribles balistiques et les cribles à disques (ou cribles à étoiles). Du début des années 2000 jusqu'à 2008, les plus utilisés étaient les cribles à disques. Mais pour des questions de contraintes de nettoyage liées, entre autres, à l'enroulement de films plastiques ou de bandelettes papiers autour des disques, les balistiques se sont fortement développés. Parallèlement, certains professionnels optent toujours, par habitude ou par préférence technique, pour le trommel qui a, lui aussi, ses avantages.
Différents types de cribles
Le choix du matériel se fait en fonction des quantités à traiter, mais aussi de la place disponible dans le centre de tri, de la hauteur du bâtiment… Les fabricants, concepteurs ensembliers de centres de tri sont nombreux sur le créneau des séparateurs mécaniques et proposent généralement différents types de cribles primaires et secondaires conçus, entre autres, pour la séparation des papiers-cartons. On peut citer l'américain BHS (Bulk Handling Systems), constructeur de cribles balistiques et à disques, qui a récemment doté ces derniers d'une nouvelle génération de disques à durée de vie plus longue, l'allemand Spadler, l'italien Hofmann Group, le néerlandais Bollegraaf Recycling Solutions… Le français Aktid, à la fois fabricant d'équipements et concepteur constructeur de centres de tri clés en main, développe ses propres cribles balistiques, dotés d'une solide réputation dans les centres de tri, et intègre également des cribles à disques d'autres marques. « Il n'y a pas de règle générale (…). La réflexion doit se mener au cas par cas, selon la nature du flux à traiter, des débits à atteindre… Ensuite, il s'agit de bien dimensionner les machines », explique Frédéric Milin, expert métier et responsable marketing chez Aktid.
Les gros cartons enlevés, ceux de plus petite taille (formats compris entre A3 et A5) sont extraits du flux principalement à la main. Ces dernières années, quelques machines ont été développées, basées sur un principe de séparation mécanique à l'aide de systèmes à picots (on pique la cartonnette pour la retirer du flux). C'est le cas de la Paper Spike créée en 2006-2007 par Bollegraaf et perfectionnée depuis. Selon différents avis du terrain, si ce système est tout à fait concluant sur les produits secs et rigides, il le serait moins sur les produits humides : le picot se met dans les trous et le carton se déchire. En outre, l'épaisseur entre en ligne de compte : efficace pour les cartons ondulés, le système trouve ses limites dès que l'on a affaire à des petits cartons trop fins… Résultat ? On ne compte qu'une toute petite poignée de machines installées en France, « mais plus d'une cinquantaine dans le monde entier », souligne Olivier Six, de Bollegraaf France, qui confirme que « la Paper Spike s'applique de préférence à des cartons secs et suffisamment épais, ce qui correspond bien à la nature des produits dans les centres modernes et ne pose pas donc pas de problèmes (…].
Le tri optique en progression
Le tri optique opère depuis peu une percée sur les papiers-cartons même si, selon Thierry Oudart, « moins de 10 % des centres de tri en sont actuellement équipés pour le traitement de ce flux ». Le contexte semble porteur. « L'ouverture expérimentale des consignes de tri à l'ensemble des plastiques est un nouveau paramètre à prendre en compte, qui plaide en faveur du tri optique », analyse le fabricant français Pellenc ST. « Les demandes récentes liées à l'extension des consignes qui génère davantage de contaminants (flacons et films plastiques) dans le papier ont donné une nouvelle impulsion à nos applications », confirme Daniel Zimmerlin, directeur commercial de Titech France. Entré dans les centres de tri il y a quelques années pour la séparation des plastiques, un domaine où les machines ont rapidement fait leurs preuves, le tri optique a mis plus de temps à convaincre sur le flux des fibreux, se heurtant à des difficultés liées à la nature même de ces déchets. « Pour un capteur optique, une fibre de cartons ressemble à s'y méprendre à une fibre de papier journal, c'est de la cellulose », résumait Daniel Zimmerlin il y a trois ans dans notre journal. De même, une machine distingue difficilement, dans un flux mélangé, un emballage écrasé, une boîte de céréales par exemple qui doit rejoindre le flux de cartonnettes, d'un imprimé qui doit gagner le flux des papiers… Conséquence : des performances bien moindres sur ces produits que celles affichées sur les plastiques. Et quelques déceptions à la clé dans certains centres de tri… « Mais les choses ont changé », assurent les constructeurs. « Les premières machines de tri du papier ont été installées en France dès 2005 », rappelle Daniel Zimmerlin. « Depuis, Titech a régulièrement fait évoluer les logiciels de ses machines. Ces derniers mois, neuf sites ont été équipés des dernières solutions pour le tri des papiers. Les machines parviennent à récupérer l'ensemble des plastiques restant dans les flux de papier après séparation mécanique, créer un flux de carton et un flux de journaux-magazines purs, respectivement jusqu'à 85 % et 90 %, explique-t-il. Des performances inégalées et ceci sans limite de granulométrie. »
Des avancées significatives
Pellenc ST annonce également des avancées significatives sur les fibreux. Pour développer des réponses adaptées aux nouveaux enjeux, la PME de Pertuis s'est « appuyée sur [son] expérience acquise lors de la conception de sa machine Boreas, une solution spécialement développée pour le tri des papiers ». Lancée en 2009, cette machine fait appel à un capteur thermographique (technologie MIR, moyen infrarouge). Son principe repose sur l'analyse du grammage des matériaux calculé à partir d'une différence infime de température. « Nous nous appuyons également sur nos récents développements majeurs en matière de spectroscopie infrarouge, avec le détecteur SPIN », explique Florence Aliberti, responsable de la communication de Pellenc. La société propose « plusieurs solutions combinant jusqu'à trois technologies phares permettant de maîtriser le tri optique des matériaux légers à grand débit ». Selon la situation rencontrée, les tonnages à traiter et les attentes du centre de tri, le fabricant décline ses propositions sous forme de « pack » machines. Ainsi, pour obtenir un flux de JRM à forte valeur ajoutée, Pellenc ST préconise son Pack Mistral (machine basée sur une technologie NIR, proche infrarouge) + Bo-reas, « un duo bien adapté aux centres souhaitant évoluer vers une ouverture des consignes de tri sur les plastiques, avec à la clé un taux de pureté des JRM répondant aux exigences de la filière ». Le Pack Boreas + Mistral Dual Vision permet « d'optimiser le tri des EMR (emballages ménagers exempts de journaux et magazines) et des JRM et de faciliter le contrôle qualité A de ces deux fractions […]. Ce duo de machines est adaptable à une grande échelle de tonnages et à des centres de tri de toutes tailles ». Pour préparer un flux de JRM, la Boreas, adaptable à des petits ou moyens tonnages, est la solution. Enfin, pour séparer les JRM et les EMR (petits ou moyens tonnages), le fabricant préconise sa configuration Mistral Dual Vision Ternaire, qui « isole ces deux flux en vue de leur contrôle qualité et permet de trier les plastiques en vue de leur redirection vers une ligne de tri spéciale ». En outre, Pellenc ST se penche sur le tri optique des papiers blancs de bureau. « Récemment déployée avec succès au Canada, cette solution est en test en France dans le cadre d'un appel à projets Pellenc ST et Ecofolio. »