RR : Avant de reprendre les rênes de la direction économie circulaire et déchets de l'Ademe, quelle était votre vision du secteur, et en particulier de l'industrie du recyclage, en France ? M.O. : J'ai plaisir à retrouver ce secteur que j'ai côtoyé au début des années 2000, quand j'ai été embauché à l'Ademe en tant qu'ingénieur chargé des procédés nouveaux de traitement des déchets. Depuis, beaucoup de choses ont changé. L'industrie du recyclage est devenue un secteur économique majeur en France ; il sera de plus en plus stratégique, alors qu'on porte enfin l'attention qu'elle mérite à la préservation des ressources et des matières. Le contexte actuel n'est pas simple : les prix bas du pétrole et des matières premières limitent les décisions d'investissement et fragilisent les équilibres économiques des filières. L'Ademe doit être créative et proposer des dispositifs innovants, comme en février le lancement de l'appel à projets Orplast « Objectif recyclage plastiques », qui vise à soutenir financièrement l'intégration de matières plastiques recyclées dans la production industrielle. Il faut aussi particulièrement soutenir les PME, qui font une grande partie de la richesse du secteur et de nos territoires et qui sont un fabuleux réservoir d'innovations. RR : Quels sont les dossiers prioritaires des six prochains mois ? Comment allez-vous les aborder ? M.O. : L'année 2016 s'annonce passionnante, avec plusieurs dossiers en cours. Pour n'en citer que quelques-uns : la territorialisation des politiques pour répondre aux nouveaux objectifs du titre « économie circulaire » de la loi relative à la transmission énergétique pour la croissance verte (LTECV), grâce aux soutiens financiers que nous permet le fonds déchets, les nouvelles missions sur le gaspillage alimentaire ou encore le paquet économie circulaire de la Commission européenne. Impossible de lister ici tous nos nouveaux défis ! Quelques-uns sont emblématiques, comme les soutiens renforcés pour les territoires « zéro déchet, zéro gaspillage » les plus ambitieux, l'appui aux conseils régionaux dans leurs nouvelles missions sur la planification déchets et sur le déploiement de l'économie circulaire, l'appel à projets pour les entreprises, la diffusion des bonnes pratiques et des exemples à suivre qui montrent que l'économie circulaire améliore la rentabilité des entreprises et représente un atout pour l'emploi. Il faut également que nous intensifiions nos réflexions sur les outils économiques, incitatifs et fiscaux qui sont encore plus nécessaires et attendus par les acteurs dans le contexte actuel de prix bas des matières premières. RR : Estimez-vous que la nouvelle dimension du volet déchets à travers l'économie circulaire et la LTECV nécessite des mutations, une autre stratégie et plus de moyens au sein de l'Ademe ? Et si oui, lesquels ? M.O. : Un nouveau contrat d'objectifs et de performance de l'Ademe va être signé dans quelques semaines. Il fixe un nouveau cap et identifie clai-rement l'économie circulaire – dont les déchets – comme l'un des deux grands domaines d'intervention de l'agence, à côté de l'énergie et du climat. Les moyens financiers sont conséquents pour aider les acteurs, notamment via le fonds déchets qui est reconduit à un niveau très élevé en 2016 (189 millions d'euros, plus millions pour la R & D). Tant dans les services centraux de l'Ademe que dans les directions régionales, les équipes s'organisent pour accompagner au mieux le basculement de la société et des acteurs vers l'économie circulaire. L'Ademe sera au rendez-vous ! n