Alors que les salariés de la sidérurgie et de la métallurgie sont descendus dans les rues de Bruxelles la semaine dernière pour manifester leurs inquiétudes face à la concurrence de la Chine, les recycleurs montent à leur tour au créneau pour apporter leur soutien. À l'origine des préoccupations, la position des instances européennes face à la concurrence chinoise considérée comme déloyale. La recrudescence des importations chinoises de produits en acier bon marché liées aux surcapacités chinoises affaiblit depuis quelques mois l'industrie européenne du recyclage. L'Europe ne semble pas faire grand-chose pour freiner ce mouvement, crai-gnant sans doute qu'on lui reproche de faire du protec-tionnisme. Pourtant, des voix s'élèvent contre cette stratégie de faiblesse qui laisse craindre une position monopolistique chinoise sur l'acier et sur certains non ferreux (aluminium), à l'instar de ce qui s'est passé pour les terres rares. En cassant les prix aujourd'hui, la Chine avec la validation passive de l'Europe pourrait très rapidement ruiner la métallurgie de l'UE. Pour la confédération des industries européennes du recyclage, Euric, l'Europe joue un rôle ambigu : « Au moment où l'Union européenne pousse les États et le marché à basculer d'une économie linéaire vers une économie circulaire, de nombreuses entreprises du recyclage de l'acier sont contraintes de ralentir temporairement leurs activités ou à disparaître, alors que les niveaux de prix pratiqués par la Chine menacent la viabilité économique du recyclage », déplore Emmanuel Katrakis, secrétaire général d'Euric. Négociants versus recycleurs Dans des conjonctures dif-ficiles, des situations habituelles sont souvent plus mal vécues. Alors que l'industrie du recyclage représentée par le BIR au niveau mondial, Federec en France ou Euric à l'échelon européen, ne cesse de promouvoir le libre-échange et l'économie de marché, celle-là même compromet aujourd'hui leur activité. Certes, la Chine ne semble pas utiliser les bonnes règles du jeu. Cela reflète néanmoins un certain malaise dont on ne veut dire le nom, au sein même de la profession. Depuis toujours cohabitent, dans les organisations de l'industrie du recyclage, négociants et recycleurs. Les premiers n'ayant pas forcément les mêmes objectifs que les seconds. Sur fond de tensions économiques, serait-il opportun de provoquer ce débat questionnant sur les priorités véritables : relancer l'industrie européenne avec plus de compétitivité et le maintien des ressources de proximité ou bien poursuivre ce commerce de matières au nom du libre-échange et du plus offrant, au risque de fragiliser un peu plus les secteurs sidérurgique et métallurgique européens ? C.M.