Championne du monde du tourisme, la France ne l’est pas encore dans la gestion des quelque cinq millions de tonnes de déchets qui en sont issus. En Ile-de-France, on en est plus à identifier les bonnes pratiques qu’à déployer des stratégies, d’après la rencontre technique organisée le 16 mai par l’Observatoire régional des déchets.
Avec 50 millions de visiteurs par an, le tourisme est la « première industrie à Paris », selon le programme local de prévention des déchets ménagers. Pourtant, la problématique des déchets liés à cette activité reste aux frontières du document. Même constat sur le site de l’Office de tourisme et des congrès de Paris : la page consacrée au « tourisme durable » met en avant la mobilité douce, les espaces verts, l’éco-consommation et les hébergements engagés dans une démarche de développement durable. Pas les consignes de tri applicables dans la capitale.
Des Parisiens mauvais en anglais
C’est par le biais des syndicats professionnels du tourisme qu’est diffusée la version anglaise du guide du tri à Paris. Un outil essentiel aux visiteurs étrangers, souligne Maxime Kayadjanian, chef de projet Europe à l’Observatoire régional des déchets d’Ile-de-France (Ordif) : « Les touristes sont très bien intentionnés vis-à-vis du tri. Dans les faits, ils le pratiquent moins que sur leur lieu de vie, par manque d’information sur les consignes. »
La ville met en avant les 467 sites signataires (contre 150 fin 2014) de la Charte pour l’hébergement durable lancée mi-2012 qui agissent, notamment, sur la réduction et le tri des déchets. Elle a aussi renforcé les moyens de collecte sur les espaces attractifs (berges de la Seine et canaux, Champs de Mars, Trocadéro, Montmartre). Depuis l’automne 2018, sont expérimentées une quarantaine de poubelles compactantes fonctionnant à l’énergie solaire, sur trois sites très fréquentés (boulevards Haussmann, place de la République, gare de l’Est). Une opération retenue dans le cadre de l’édition 2017 du budget participatif.
L’événementiel pour doper l’usuel ?
Les JO vont stimuler l’offre de solutions dans le domaine de l’événementiel. L’association des Canaux envisage de monter « un consortium » d’acteurs de l’économie sociale et solidaire (ESS), de « taille critique » pour se mesurer « aux grands groupes qui vont préempter le marché », indique Christophe Divy, directeur du projet ESS 2024. En matière de gestion des déchets de restauration, la COP21 de fin 2015 avait fourni un tremplin à Moulinot, autre représentant de l’ESS. L’entreprise a depuis été retenue, aux côtés de Derichebourg, pour collecter et valoriser les biodéchets ménagers de six arrondissements parisiens, à partir de 2021.
Le Syctom, qui traite les 2,3 millions de tonnes de déchets de l’agglomération parisienne, est actionnaire depuis deux ans de la Semardel, société d’économie mixte de l’Essonne intervenant sur le tournoi de Roland-Garros. En 2018, 525 tonnes y ont été triées en 17 flux et valorisées à 65 % sous forme d’énergie (électricité, biogaz) et 35 % sous forme de matière (matière première secondaire, compost, combustible solide de récupération). La Fédération française de tennis réserve toutefois les fontaines à eau aux sportifs et aux personnels. 215.000 bouteilles d’eau ont donc été vendues sur le stade l’an dernier. Le monde de l’ESS invite à y récupérer les balles de tennis (plus de 66.000 utilisées en 2017).
Le tri des déchets obligatoire à Roland Garros / Crédit : Semardel