La densification n’est guère populaire et « des candidats aux municipales font campagne sur le thème du village, à moins de 10 km de la Porte de Bagnolet », relevait-on lors de l’atelier de l’Institut Paris Région sur la reconstruction de la ville sur elle-même. L’Ile-de-France urbanise 840 ha/an et en renature 250. Pour aller vers zéro artificialisation nette, « il conviendrait de consommer 400 ha et d’en rendre autant à la nature », pose le directeur de l’Institut, Fouad Awada. Principale piste évoquée le 27 février : réinvestir le bâti existant et les terrains délaissés.
On sait ce qu’il ne faut plus faire : autour de Marne-la-Vallée, l’habitat, les pôles tertiaires et touristiques, les zones d’activité et logistiques ont absorbé, de 1982 à 2017, 30 % des espaces naturels, agricoles et forestiers, selon l’Institut Paris Région. « Eurodisney a alloué la même surface aux parkings qu’au complexe touristique (soit 56 ha) », note Karim Ben Meriem, architecte urbaniste à l’agence francilienne d’urbanisme.
Ne plus araser
On sait aussi comment moins artificialiser les sols et refaire la ville sur elle-même : agir sur les immeubles et zone d’activité vacants, surélever les bâtiments, convertir les sous-sols en entrepôts logistiques de proximité, ériger des logements sur d’anciens parkings ... Pourtant, « on continue à faire de la démolition-reconstruction comme au 20ème siècle, car c’est le plus facile et le plus rentable, observe l’architecte-urbaniste Béatrice Mariolle. Les projets liés au Grand Paris Express portent tant de destructions qu’on ne sait où stocker les déchets. Cette culture de la table rase perdurera si on n’instaure pas de contrainte ». L’enseignante-chercheuse plaide pour la valorisation de l’existant : « L’étude qui démarre pour accompagner la Seine-Saint-Denis dans l’élaboration d’une vision à 2030 répertorie toutes les friches - terrains et bâtiments. Il y a de quoi faire ! »
Reconquérir ou renaturer les sites en jachère
La région engage un inventaire des friches (industrie, agriculture, habitat, commerce) et lance un appel à manifestation d’intérêt (doté de 2 millions d’euros1) auprès des collectivités, qu’elle appuiera aux plans de l’ingénierie et des acquisitions. Le sujet est « au cœur des échanges avec l’Etat sur l’élaboration du futur contrat de plan », signale Olivier Denert, directeur de l’aménagement. Qui entrevoit une possible réduction de 10 % de la consommation nette d’espace régional (de 590 ha/an) en réinvestissant les friches.
Plaine Commune (Seine-Saint-Denis) a fondé sa trame verte et bleue sur l’étude des friches menée il y a une quinzaine d’années, relate l’écologue Marine Linglart. « L’Etablissement public territorial (EPT) a urbanisé certains espaces et en a mis d’autres sous cloche, notamment autour des infrastructures urbaines » Le long de l’A86, « les franges s’étendent sur 6.600 ha, soit onze ans d’artificialisation nette sur la région, relève Karim Ben Meriem. L’articulation entre l’A4 et la Francilienne occupe 28 ha, dans un espace boisé ». Si ces surfaces ne sont pas intégralement mobilisables, elles recèlent un potentiel certain.
Bâtir sans détenir le sol
L’EPT Grand Paris Grand Est (Seine-Saint-Denis) « explore l’idée d’autoriser des constructions sans transférer la propriété du sol, bien commun pour lequel il faut définir une stratégie », expose son directeur de l’aménagement et de l’urbanisme, Djamel Hamadou. La gare de Rosny-Bois-Périer2 sera le premier terrain de « R&D ». La contrainte se profile : sur ce site bien relié aux transports publics, il n’y a aura pas de parking enterré.
1 : candidature à déposer avant le 20/04/20 2 : future correspondance entre la ligne E du RER et le métro (futures ligne 11 prolongée et ligne 15)