Piloté entre 2015 et 2019 par l’Insa de Lyon, le programme de recherche MicroMegas a comparé l’efficacité de systèmes à la source et centralisés sur l’abattement de micropolluants dans les rejets urbains de temps de pluie. Affichant les meilleures performances, les systèmes diffus, noues en tête, ont prouvé leur intérêt pour abattre les différentes familles de micropolluants.
Soutenu par l’Agence française de la biodiversité (devenu OFB) et l’agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse dans le cadre de l’appel à projets « Innovation et changements de pratiques : micropolluants des eaux urbaines » lancé en 2013, le projet MicroMegas a été mené entre 2015 et 2019 par le laboratoire Déchets eaux environnement pollution (Deep) et le laboratoire EVS (Environnement ville et société) de l’Insa de Lyon en partenariat avec le Graie, l’Othu et la métropole du Grand-Lyon. Le rôle des techniques alternatives dans la gestion des micropolluants contenus dans les rejets urbains de temps de pluie a été étudié en comparant l’efficacité de deux types de techniques alternatives : les systèmes diffus (noues, tranchées, chaussées à structure réservoir) et les systèmes centralisés (gros bassins de rétention et infiltration). « Toutes les techniques alternatives au réseau remplissent des fonctions de rétention-stockage, infiltration et évapotranspiration des eaux pluviales », précise Sylvie Barraud, directrice du département génie civil et urbanisme au laboratoire Dee de l’Insa de Lyon qui a coordonné ce projet.
Le suivi a porté, d’une part, sur trois sites expérimentaux (noue, tranchée, chaussée réservoir) installés sur l’écocampus Lyon Tech-La Doua et sur le bassin de retenue-infiltration Django-Reinhardt qui draine un bassin versant de 185 ha. dans l’Est lyonnais. Répartis en six familles (métaux, HAP, bisphénolA, alkylphénols, pesticides, PBDE), 59 micropolluants ont été recherchés en entrée et en sortie des dispositifs instrumentés dans le cadre de douze campagnes d’analyse réalisés pendant 130 événements pluvieux. Certains polluants sont présents en phase particulaire (HAP et métaux), d’autres en phase dissoute (pesticides, bisphénolA) ou mixte (alkylphénols). Les abattements entre entrée et sortie ont été évalués par comparaison avec des systèmes de référence (un réseau pour le bassin et une surface imperméabilisée classique pour les systèmes à la source).
Résultats : une contamination des eaux pluviales en entrée non négligeable, les 59 substances recherchées ayant été détectées au moins une fois. Le niveau de pollution est cependant très variable d’un site à l’autre et d’un événement à l’autre sur un même site. Globalement, tous les systèmes diffus réalisent un abattement en volume efficace qui réduit les rejets de micropolluants. Les abattements en masse les plus importants ont également été mesurés en sortie des petits systèmes décentralisés.
La noue affiche ainsi les meilleures performances, avec un abattement en masse médian de l’ordre de 80 %, y compris sur les pesticides. Viennent ensuite dans l’ordre les tranchées, les chaussées à structure réservoir et, en dernier, le bassin dont les performances d’abattement en masse sont plus variables d’un polluant à l’autre et mauvaises sur les pesticides, relargués par le système. « Tous ces systèmes ont un bénéfice sur les milieux à comparer à l’impact de la pollution ponctuelle générée par les réseaux unitaires. Les bassins jouent essentiellement un rôle de décantation des polluants particulaires. Dans les systèmes diffus, plusieurs mécanismes se côtoient (filtrations mécanique et physico-chimique, dégradation), ce qui leur confère un potentiel d’abattement sur tous les micropolluants, particulaires et dissous. Force est de constater également que l’interception des volumes d’eau est un levier particulièrement efficace pour les systèmes diffus. Par ailleurs, la présence de végétaux, qui favorisent une bonne qualité du sol, améliore encore ces performances », poursuit Sylvie Barraud.
Les résultats prometteurs de MicroMegas seront synthétisés au sein d’un guide méthodologique avec ceux de deux autres études issues de l’appel à projets de l’AFB, Matriochkas et Roulépur. Des indicateurs seront définis pour le suivi de ces dispositifs et leur entretien. « L’infiltration des eaux pluviales dans le sol limite les impacts des micropolluants dans les nappes mais, au-delà, il est nécessaire de changer les pratiques pour arrêter de libérer ces micropolluants dans le milieu », conclut Sylvie Barraud.
Cet article est la seconde partie du dossier "Eaux pluviales : techniques alternatives, l’infiltration comme barrière à la pollution", publié dans le numéro 254 d’Hydroplus : - Relire l’introduction, publiée le mercredi 6 mai. - Relire la première partie "Matriochkas se penche sur les noues", publiée le jeudi 7 mai. A venir : - La troisième partie : "Roulépur cible le ruissellement des voiries et des parkings urbains", publiée le mardi 12 mai.