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Accueil > Actualités > Mobilité > Revirement de jurisprudence sur le statut juridique des contrats de mobilier urbain
MOBILITÉ

Revirement de jurisprudence sur le statut juridique des contrats de mobilier urbain

PUBLIÉ LE 1er JUILLET 2014
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CE 15 mai 2013 Ville de Paris n° 364593 Le revirement de jurisprudence opéré par le Conseil d'État sur la qualification des contrats de mobiliers urbain est l'occasion de revenir sur l'évolution de leur régime. COMMENTAIRE De 1964 jusqu'à la fin des années 1990, les contrats de mobiliers urbains publicitaires ont été passés sans mise en concurrence préalable des prestataires. Dans deux arrêts d'assemblée du 4 novembre 2005 (n° 247298 et 247299), qualifiés de majeurs, le Conseil d'État avait jugé que les contrats de mobiliers urbains constituaient des marchés publics et devaient donc donner lieu à la mise en concurrence préalable des opérateurs désireux de contracter avec les communes. Après la décision du Conseil de la concurrence du 7 juillet 1998 (1) et jusqu'à maintenant, la quasi-totalité des contrats de mobiliers urbains publicitaires ont été établis ou renouvelés dans le cadre légal de marchés publics de services. Le Conseil d'État, dans un arrêt du 15 mai 2013, semble remettre en cause le principe de la mise en concurrence des candidats. Cette décision, contre-pied des deux arrêts d'assemblée de 2005, nous invite à revenir sur la lente évolution du statut juridique des contrats de mobiliers urbains publicitaires (I) avant d'exposer le cheminement du revirement jurisprudentiel et ses conséquences juridiques sur le marché du mobilier urbain publicitaire (II). I. La lente évolution du statut juridique des contrats de mobiliers urbains publicitaires Le statut juridique des contrats de mobiliers urbains publicitaires n'a jamais été réellement encadré ni dans le code de l'environnement, ni dans le droit des contrats publics. Le mobilier urbain, en tant que support publicitaire sur le domaine public, fait sa première apparition juridique dans les articles 5 et 7 du décret n° 76-148 du 11 février 1976 relatif à la publicité et aux enseignes visibles des voies ouvertes à la circulation publique, inséré en 2001 dans la partie réglementaire du Code de la route : Article 5 Il est interdit d'apposer des placards, papillons, affiches ou marquages sur les signaux réglementaires et leurs supports ainsi que sur tous autres équipements intéressant la circulation routière. Cette interdiction s'applique également sur les plantations, les trottoirs, les chaussées et d'une manière générale, sous réserve des dérogations admises pour le mobilier urbain dans les conditions prévues à l'article 7 ci-après, sur tous les ouvrages situés dans les emprises du domaine routier ou surplombant celui-ci (…). Article 7 La publicité et les enseignes publicitaires et préenseignes sont interdites sur l'emprise des voies ouvertes à la circulation publique, à l'exception de la publicité peinte ou fixée sur des véhicules circulant ou stationnant régulièrement sur les voies ouvertes à la circulation publique. Toutefois, des dérogations peuvent être accordées par l'autorité investie du pouvoir de police : 1° À l'intérieur des agglomérations, pour les enseignes publicitaires et pour la publicité placée sur le mobilier urbain dans les conditions prévues par arrêté conjoint du ministre de l'Équipement et du ministre de l'Intérieur. 2° (…). Le mobilier urbain bénéficie donc d'un statut dérogatoire confirmé par l'arrêté interministériel du 14 octobre 1977, annulé par le Conseil d'État aux termes de deux arrêts successifs du 22 décembre 1978 (2). La loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes et le décret n° 80-923 du 21 novembre 1980 portant règlement national de la publicité en agglomération fixent les conditions d'installation et d'utilisation du mobilier urbain comme support publicitaire et énumèrent la typologie des mobiliers urbains publicitaires et leurs fonctionnalités. Le décret du 21 novembre 1980 n'était pas un catalogue de mobiliers urbains publicitaires, mais il listait les mobiliers urbains, que l'on rencontre toujours sur le domaine public 33 ans après l'adoption du texte. S'il énumérait limitativement les mobiliers urbains publicitaires et définissait leur utilisation fonctionnelle, ce décret était totalement muet sur le mode opératoire contractuel qui devait fixer les règles et modalités de mise en place des contrats de mobiliers urbains publicitaires entre les opérateurs de publicité extérieure et les collectivités locales. La question était alors très controversée. Pour les partisans de la thèse de la délégation de service public, c'est l'origine de la rémunération de l'opérateur, à partir de l'exploitation publicitaire des mobiliers urbains, et non d'un prix versé par la collectivité, qui justifiait la qualification de délégation de service public. Mais cette thèse est combattue en raison de ce qu'aucune prestation n'est fournie par l'opérateur aux usagers mais à la collectivité et de ce que l'opérateur n'assume aucune responsabilité dans l'élaboration de l'information municipale. Enfin, l'opérateur ne perçoit aucun prix auprès des usagers destinataires de l'information municipale mais se borne à commercialiser les espaces publicitaires des mobiliers urbains auprès des annonceurs. Pour les partisans du Code des marchés publics, qui se fondent sur l'avis du Conseil d'État du 14 octobre 1980 ci-après évoqué, un contrat de mobilier urbain est un marché public. Pour les partisans de la thèse de la convention d'occupation du domaine public, un contrat de mobilier urbain n'était jamais qu'un contrat d'occupation du domaine public. Mais cette thèse est pareillement combattue puisque l'opérateur de mobilier urbain n'est pas qu'un simple occupant du domaine public. Il fournit à la collectivité des prestations en contrepartie desquelles il est, en effet, autorisé à occuper le domaine public mais sans acquitter de redevance d'occupation domaniale. Pour remédier au flou juridique, le Conseil d'État avait publié dès le 14 octobre 1980 un avis (3) selon lequel les contrats de mobilier urbain « constituent une variété de marchés publics, marchés de prestations de service, assortis d'autorisations d'occupation du domaine public ». Mais cet avis est resté sans effet et les contrats de mobiliers urbains publicitaires ont continué à être établis et renouvelés de gré à gré, sans mise en concurrence préalable des opérateurs, jusqu'à la fin des années 1990. Les chambres régionales des comptes alertaient régulièrement, dans leurs rapports, les collectivités locales sur la durée anormalement longue des contrats de mobiliers urbains, l'absence de mise en concurrence des opérateurs et la pratique des avenants glissants (4) que les juridictions administratives de premier degré sanctionnaient régulièrement (5). Dans sa décision du 7 juillet 1998 (6), le Conseil de la concurrence a repris les avis de la Commission de 1978 et 1980 et a constaté qu'un mobilier urbain publicitaire n'était pas substituable à un mobilier urbain non publicitaire et conclu qu'il y avait donc lieu de distinguer le secteur du mobilier urbain publicitaire et le secteur du mobilier urbain non publicitaire. Il a ainsi refusé de considérer l'existence d'un marché unique entre le mobilier urbain publicitaire et le mobilier urbain non publicitaire. Pour finir, le Conseil de la concurrence a enjoint au groupe JCDecaux de ne pas proposer aux collectivités locales de clauses contractuelles lui reconnaissant un droit de priorité pour l'extension des contrats en cours, de ne pas proposer de clause permettant la technique des avenants dits glissants ni de proposer de clause de tacite reconduction. C'est dans ce contexte que sont intervenus les deux arrêts d'assemblée du Conseil d'État du 4 novembre 2005 intéressant les communes de Villetaneuse et Clichy-sous-Bois et leurs contrats de mobiliers urbains avec la société JCDecaux. La société JCDecaux avait négocié de gré à gré des avenants de reconduction de contrats de 1966 pour Clichy-sous-Bois et de 1970 pour Villetaneuse, en vue de la fourniture de mobiliers urbains (notamment des abris et des mobiliers urbains pour l'information…) en remplacement des mobiliers d'origine, moyennant la prolongation des contrats en cours. Pour le Conseil d'État, l'objet des deux contrats était de permettre la réalisation et la fourniture de prestations de services pour les deux communes, en matière d'information municipale, de propreté et de protection des usagers des transports publics contre les intempéries. En contrepartie, les deux communes avaient autorisé la société JCDecaux à utiliser une partie des mobiliers à des fins publicitaires et l'avaient exonérée de redevance d'occupation du domaine public. Le Conseil d'État avait vu dans ces deux contrats des contrats conclus à titre onéreux par les deux communes, entrant dans le cadre du Code des marchés publics et devant dès lors donner lieu à mise en concurrence préalable des opérateurs. Entre-temps, les collectivités n'avaient pas attendu ces deux arrêts pour appliquer le Code des marchés publics à la mise en place de leurs contrats de mobiliers urbains. Avec la généralisation des appels d'offres, l'établissement des contrats de mobiliers urbains en était ressorti procéduralement clarifié. C'est tout cet édifice juridique du Conseil d'État et des juridictions administratives de 1987 à 2005 qui se trouve désormais remis en cause avec l'arrêt Ville de Paris du 15 mai 2013. II. Le cheminement du revirement jurisprudentiel du 15 mai 2013 et ses conséquences juridiques sur le marché du mobilier urbain publicitaire Le cheminement du revirement jurisprudentiel du 15 mai 2013 Pour le Conseil d'État, un contrat de mobiliers urbains publicitaires (dans le cas de colonnes et de mâts porte-affiches) n'est ni une délégation de service public ni un marché public. C'est une concession d'occupation domaniale dont l'établissement ne requiert aucune mise en concurrence préalable, une position très critiquée par une large partie de la doctrine (7). La Ville de Paris conclut le 18 octobre 2005 de gré à gré avec la société JCDecaux un contrat de mobilier urbain portant sur 550 colonnes Morris et 700 mâts porte-affiches, après autorisation par le conseil municipal de Paris le 26 septembre 2005. Un concurrent de la société JCDecaux, la société Cbs Outdoor, conteste cette attribution de gré à gré et saisit le tribunal administratif de Paris qui, le 24 avril 2009, annule la délibération du conseil du 26 septembre 2005 et le contrat du 18 octobre 2005 qui selon lui constitue une délégation de service public qui aurait dû donner lieu à mise en concurrence préalable des candidats opérateurs dans le respect des dispositions des articles L. 1411-1 et suivants du Code général des collectivités territoriales. Sur appel de la Ville de Paris, la cour administrative d'appel de Paris annule le 17 octobre 2012 le jugement du tribunal administratif. Pour la cour, le contrat du 18 octobre 2005 est un marché public qui aurait dû donner lieu à mise en concurrence des candidats. En outre, les juges d'appel enjoignent au maire de Paris de résilier le contrat du 18 octobre 2005 au plus tard à l'expiration d'un délai de huit mois à compter de l'arrêt du 17 octobre 2012. La cour administrative d'appel, qui n'a pas oublié que ses arrêts du 24 février 2002 Villetaneuse et Clichy-sous-Bois avaient été annulés par le Conseil d'État le 4 novembre 2005, s'en est prudemment tenue cette fois à la thèse des marchés publics. C'est là que le revirement jurisprudentiel du Conseil d'État prend tout son sens. Pour ce dernier, la Ville de Paris a déterminé, avec la société JCDecaux, des emplacements sur le domaine public pour l'installation de colonnes et de mâts porte-affiches. Ces implantations devaient offrir une répartition homogène des mobiliers sur les vingt arrondissements parisiens et ne pouvaient être modifiées qu'avec l'accord exprès de la Ville de Paris. La société devait affecter une partie des colonnes et des mâts porte-affiches pour la communication des cirques, des théâtres et des films d'art et d'essai et proposer des conditions tarifaires privilégiées, sous le contrôle de la Ville de Paris. Elle devait en outre établir chaque année un compte rendu comportant un volet financier et un volet d'activité. En ayant affecté une partie des mobiliers urbains JCDecaux à la communication des cirques, des théâtres et des films d'art et d'essai à des conditions tarifaires privilégiées, la Ville de Paris répond ainsi à une mission d'intérêt général de promotion des activités culturelles organisées à Paris. Mais comme ces activités culturelles ne sont assurées ni par la Ville de Paris elle-même ni pour son compte, le contrat du 18 octobre 2005 ne constitue pas un marché public, au sens de l'article 1er du Code des marchés publics. Il ne s'agit pas non plus d'une délégation de service public car la Ville de Paris n'a pas non plus entendu créer un service public de l'information culturelle mais simplement utiliser son domaine pour permettre la promotion de la vie culturelle à Paris. Le contrat du 18 octobre 2005 prévoit en outre à la charge de la société JCDecaux le paiement d'une redevance d'occupation domaniale comprenant une part fixe de 9 050 000 euros par an. Pour le Conseil d'État, il ne s'agit alors que d'une simple concession domaniale dont les règles de passation sont empreintes de la plus grande liberté. Le Conseil d'État reprend à cet égard les considérants traditionnels qu'il avait déjà utilisés dans un arrêt du 3 décembre 2010 (8) : Aucune disposition législative ou réglementaire ni aucun principe n'imposent à une personne publique d'organiser une procédure de publicité préalable à la délivrance d'une autorisation ou à la passation d'un contrat d'occupation d'une dépendance du domaine public, ayant dans l'un ou l'autre cas pour seul objet l'occupation d'une telle dépendance. Il en va ainsi même lorsque l'occupant de la dépendance domaniale est un opérateur sur un marché concurrentiel. L'absence d'une telle procédure n'entache pas d'irrégularité une autorisation ou une convention d'occupation d'une dépendance du domaine public. Ainsi, la Ville de Paris n'était pas tenue de mettre en œuvre une nouvelle procédure de publicité et de mise en concurrence avant de décider de conclure la convention d'occupation du domaine public litigieuse avec la société JCDecaux. À ce stade d'une telle évolution de la jurisprudence du Conseil d'État, apparemment très éloignée des précédents arrêts d'assemblée de 2005, on peut légitimement se demander ce qui reste de sa jurisprudence antérieure. Les conséquences du revirement jurisprudentiel du 15 mai 2013 Est-ce que l'arrêt du 15 mai 2013 met un terme à la parenthèse ouverte avec les deux arrêts d'assemblée du 4 novembre 2005 ? La réponse à cette question paraît être positive, mais il convient toutefois d'affiner les conséquences de cet arrêt en fonction des mobiliers urbains publicitaires et des conditions de leur utilisation. Selon le subtil raisonnement juridique du Conseil d'État, le mobilier urbain, publicitaire, ou non, qui apporte un service à la collectivité locale ou qui répond à un besoin de la collectivité locale, entre dans les prévisions de l'article 1er du Code des marchés publics aux termes duquel « I.– (…). Les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux entre les pouvoirs adjudicateurs définis à l'article 2 et des opérateurs économiques publics ou privés, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services (…) ». Les mobiliers urbains non publicitaires (bancs, potelets, corbeilles, lampadaires, poteaux de signalisation urbaine…) apportent des services à la collectivité et répondent à ses besoins de confort, de signalisation et d'éclairage. À l'inverse, le mobilier urbain publicitaire, ou non, qui n'apporte aucun service à la collectivité locale et ne répond à aucun de ses besoins n'entre pas dans les prévisions de l'article 1er du Code des marchés publics. C'est le sens de l'arrêt du 15 mai 2013. Si l'on se réfère à la « nomenclature » des mobiliers urbains publicitaires des articles R. 581-42 à R. 581-47 du Code de l'environnement, dans leur version postérieure au décret du 30 janvier 2012, on constate que la plupart des mobiliers urbains mentionnés aux articles précités n'apportent strictement aucun service à la collectivité locale et ne répondent à aucun de ses besoins. Ces mobiliers urbains n'entrent pas dans les prévisions de l'article 1er du Code des marchés publics. Mentionnés à l'article R. 581-43 du Code de l'environnement : « Les abris destinés au public peuvent supporter des publicités d'une surface unitaire maximale de 2 mètres carrés, sans que la surface totale de ces publicités puisse excéder 2 mètres carrés, plus 2 mètres carrés par tranche entière de 4,50 mètres carrés de surface abritée au sol. L'installation de dispositifs publicitaires surajoutés sur le toit de ces abris est interdite ». Les abris-voyageurs rendent service aux usagers des transports en commun. Ils les protègent des excès du soleil ou des intempéries, mais ils n'apportent aucun service à la collectivité. Aucune face publicitaire des abris n'est d'ailleurs réservée à la collectivité. L'article R. 581-43 du Code de l'environnement ne l'exige absolument pas. Il en est de même des kiosques à journaux et des kiosques à usage commercial de l'article R. 58144 du Code de l'environnement : « Les kiosques à journaux et autres kiosques à usage commercial édifiés sur le domaine public peuvent supporter des publicités d'une surface unitaire maximale de 2 mètres carrés, sans que la surface totale de la publicité puisse excéder 6 mètres carrés. L'installation de dispositifs publicitaires surajoutés sur le toit de ces kiosques est interdite. » Les kiosques à journaux et les kiosques à usage commercial ne rendent aucun service à la collectivité locale et ne répondent à aucun de ses besoins. Ils rendent service aux lecteurs de presse et aux consommateurs des produits diffusés dans les kiosques. Il en est de même des colonnes porte-affiches de l'article R. 581-45 du Code de l'environnement selon lequel « Les colonnes porte-affiches ne peuvent supporter que l'annonce de spectacles ou de manifestations culturelles ». Dès lors que les spectacles et manifestations culturelles ne sont pas organisés par la collectivité locale, ces colonnes porte-affiches ne rendent aucun service à la collectivité locale et ne répondent à aucun de ses besoins. C'est ce qu'a retenu le Conseil d'État dans son arrêt du 15 mai 2013 pour les colonnes Morris de la Ville de Paris. La même analyse vaut pour les mâts porte-affiches dont les fonctionnalités sont précisées à l'article R. 581-46 du Code de l'environnement selon lequel « Les mâts porte-affiches ne peuvent comporter plus de deux panneaux situés dos à dos et présentant une surface maximale unitaire de 2 mètres carrés utilisable exclusivement pour l'annonce de manifestations économiques, sociales, culturelles ou sportives ». Dès l'instant que ces manifestations ne sont pas organisées par la collectivité, ces mâts porte-affiches ne rendent aucun service à la collectivité et ne répondent à aucun de ses besoins. C'est ce qu'a retenu le Conseil d'État dans son arrêt du 15 mai 2013 pour les mâts de la Ville de Paris. Seuls les mobiliers urbains relevant de l'article R. 581-47 du Code de l'environnement sembleraient apporter un service et répondre aux besoins de la collectivité mais pas dans tous les cas. Selon cet article, « Le mobilier urbain destiné à recevoir des informations non publicitaires à caractère général ou local, ou des œuvres artistiques, ne peut supporter une publicité commerciale excédant la surface totale réservée à ces informations et œuvres. Lorsque ce mobilier urbain supporte une publicité d'une surface unitaire supérieure à 2 mètres carrés et qu'il s'élève à plus de 3 mètres au-dessus du sol, il doit être conforme aux dispositions des articles R. 581-31 et R. 58132 et du premier alinéa de l'article R. 581-33 ». Il s'agit des mobiliers urbains pour l'information de formats 2 m2 , 4 m2 , 8 m2 ou 12 m2 , dont, généralement, une face fixe ou évolutive est réservée à la communication de la collectivité locale. On peut alors facilement admettre que cette face-là est utile à la collectivité locale si elle y décline des messages informatifs, administratifs, sociaux, culturels, historiques, de civisme, d'hygiène, de santé publique, de prévention… Mais si cette face est en permanence affectée à la mise en place d'un plan de ville, il est possible de soutenir que le plan de ville est un service apporté aux personnes de passage, aux touristes et aux personnes désorientées. De même, si cette face comporte une œuvre d'art, comme l'article R. 581-47 du Code de l'environnement le permet, il est également possible de soutenir que ce mobilier d'information, support ponctuel d'œuvres artistiques, n'apporte aucun service à la collectivité locale mais assure la promotion d'un peintre local ou régional. On voit que la question ci-avant posée, dès qu'il s'agit des mobiliers urbains d'information relevant des dispositions de l'article R. 581-47 du Code de l'environnement, n'appelle pas une réponse unique et globale mais exige au contraire des réponses nuancées. L'arrêt du Conseil d'État du 15 mai 2013 conduit à retenir que ni les abris-voyageurs, ni les kiosques à journaux et kiosques à usage commercial, ni les colonnes porte-affiches, ni les mâts porte-affiches n'apportent de services aux collectivités locales. Par conséquent, ces mobiliers urbains qui ne répondent à aucun besoin des collectivités locales n'entrent pas dans les prévisions du code des marchés publics et aucune mise en concurrence n'est à mettre en œuvre pour désigner le prestataire qui les installera et en assurera l'exploitation et l'entretien. Quant aux autres mobiliers urbains relevant de l'article R. 581-47 du Code de l'environnement, seuls ceux qui apportent un service ou répondent à un ou des besoins de la collectivité devraient donner lieu à mise en concurrence préalable, en tant qu'ils entrent dans les prévisions de l'article 1er du Code des marchés publics, mais seulement si les seuils des marchés publics sont franchis. CONCLUSION Cet arrêt constitue un fort revirement de la jurisprudence administrative quant au statut juridique des contrats de mobiliers urbains. Mais on ne peut que constater que le Conseil d'État est fidèle à sa jurisprudence sur la liberté d'établissement des concessions domaniales (9). Une partie de la doctrine ne partageait pas l'analyse du Conseil d'État dans l'arrêt Stade Jean Bouin précité, car elle y voyait déjà un sévère recul dans la mise en œuvre des règles de concurrence dans le cadre de l'occupation du domaine public par un opérateur relevant du secteur concurrentiel. La même doctrine ne partage pas plus le sens de l'arrêt du 15 mai 2013 et le raisonnement qui a conduit à cette décision. Christophe Roux (10) parle d'un recul « dans l'exigence de publicité et de mise en concurrence des titres d'occupation domaniale ». Il est certain que l'arrêt du 15 mai 2013 supprime l'obligation de mise en concurrence préalable des opérateurs de publicité extérieure pour l'obtention de contrats de mobiliers urbains publicitaires. Une juridiction administrative de premier degré avait déjà jugé fin 2000 qu'un contrat de mobilier urbain n'était jamais qu'une concession domaniale et pas un marché public ni une délégation de service public (11). Pour les juges de Grenoble, un contrat de mobilier urbain, dépourvu de toute redevance d'occupation domaniale, et dont le bénéfice est substantiellement assuré par les recettes publicitaires, provenant de tiers au contrat, qui ne peuvent être regardées comme constitutives d'un prix payé par la commune, ne constitue pas un marché public. En outre, ce contrat ne constitue en rien une délégation de service public dès lors qu'il ne délègue au prestataire aucune exploitation de service public. Un tel contrat ne constitue dès lors qu'un contrat d'occupation du domaine public. En définitive, ce sont les mêmes principes juridiques qui ont inspiré le 15 décembre 2000 et le 15 mai 2013 les juges de Grenoble et ceux du Conseil d'État.
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