Aujourd’hui, dans de nombreuses grandes entreprises, les considérations environnementales, sociales et de gouvernance (ESG) sont de plus en plus souvent au cœur même de la stratégie de l’entreprise. Si les rapports sur les émissions de carbone sont essentiels, l’ESG nécessite une approche holistique. Les entreprises, qu’il s’agisse d’un industriel, d’un fournisseur de service ou de services publics, doivent commencer à intégrer le développement durable dans leur stratégie commerciale et leur planification financière, et expliquer comment cela fonctionne, développe dans cette tribune Ludovic Ponthier, Presales director d’IFS.
Il n’est pas facile pour les entreprises de tirer parti de la promesse de l’ESG. Elle va au-delà des simples mesures et nécessite généralement une compréhension approfondie de l’ensemble de la supply chain. Si les conseils d’administration saisissent désormais l’importance de l’ESG et son « pourquoi », la transposition de son envergure peut s’avérer décourageante. Dans une entreprise, la bonne gouvernance repose sur l’adhésion de tous les membres de l’entreprise et sur la compréhension de leur rôle.
Intégrer l’ESG : un effort transversal Chaque service a un rôle distinct à jouer dans la mise en œuvre de l’ESG au sein de l’entreprise. Il ne s’agit pas d’un simple réarrangement des responsabilités, mais d’une évolution qui exige des entreprises qu’elles comblent les lacunes de leur structure organisationnelle. L’intégration de l’ESG dans toutes les fonctions garantit que le développement durable fait partie intégrante de l’ADN de l’entreprise plutôt que d’être une initiative isolée. Cela peut se faire en partie par le biais de lobbying ESG qui contribuent à garantir que les idées sont transmises à l’ensemble de l’entreprise. Elles sont clairement visibles dans les unités opérationnelles, en veillant à ce que les données de la supply chain liées à l’ESG soient vues et comprises par les parties concernées de l’entreprise, telles que les achats, par exemple. Outre la visibilité des données par les différents départements concernés, il est également important que les membres de la direction disposent de la visibilité appropriée, car ils ont un rôle à jouer pour garantir le succès de l’ESG. Pour certains, cela se traduit par la mise en place d’un responsable du développement durable (CSO) qui aide à définir la vision, les objectifs et les politiques liés au développement durable et assure l’alignement avec la stratégie globale de l’entreprise. Cependant, l’ESG reste un domaine émergent, ce qui signifie que le rôle d’un CSO est souvent absent alors que les objectifs demeurent. C’est cette absence qui souligne l’importance d’autres membres du conseil d’administration, tels que le directeur financier et le directeur des achats, dans une approche ESG réussie. Le directeur financier (CFO) : traduire la stratégie en actions financières Le rôle des CFO dans la gouvernance durable est capital. Une récente enquête du cabinet de conseil en gestion Ernst & Young (EY), révèle que les questions ESG étaient considérées comme une priorité absolue, au même titre que la technologie et l’innovation numérique (43 %). Les directeurs financiers ont un rôle multiple à jouer lorsqu’il s’agit d’atteindre les principaux objectifs de l’entreprise en matière d’ESG. Ils recueillent les commentaires des clients, puis aident à développer des stratégies ESG qui intègrent des termes financiers, mais les traduisent ensuite en objectifs qui peuvent être lus, compris et mis en œuvre par l’entreprise. En ce sens, ils sont effectivement des agents de transformation pour l’entreprise.
Les réglementations ESG apportent des changements à un certain niveau, mais lorsque le directeur financier les analyse plus en détail, il se rend compte qu’elles peuvent apporter beaucoup plus, ce qui lui permet de mettre en place des structures de gouvernance, à concevoir des processus et à mettre en œuvre des politiques pertinentes.
En intégrant la stratégie ESG à l’action financière, les directeurs financiers ouvrent la voie à la canalisation des capitaux vers les investissements ESG, renforçant ainsi la faisabilité financière du développement durable.
Les directeurs financiers peuvent influencer la stratégie de l’entreprise pour s’assurer que les facteurs ESG sont pris en compte dans la planification à long terme, les investissements et les décisions opérationnelles. Ils peuvent aider à allouer des ressources aux initiatives ESG, en veillant à ce qu’elles contribuent à la performance financière et à la création de valeur, ce qui est crucial pour les relations avec les investisseurs.
Les directeurs financiers jouent également un rôle clé dans la communication du message ESG de l’entreprise. Ils doivent être en mesure d’articuler la stratégie, les réalisations et les objectifs de l’entreprise en matière d’ESG de manière à ce qu’ils correspondent aux valeurs et aux attentes des investisseurs potentiels.
Le CPO : le développement durable au cœur de la supply chain Dans le même temps, le CPO (chief procurement officer) est le principal orchestrateur des efforts de la supply chain en matière de développement durable. Avec la tâche de gérer les émissions de type 3, le mandat du responsable des achats est vaste : il va de la garantie d’un approvisionnement éthique à la minimisation de l’impact sur l’environnement. Dans l’industrie lourde, par exemple, il devra s’efforcer de travailler avec les fournisseurs pour comprendre le cycle de vie des matériaux qu’ils fournissent. Elles devront choisir ceux dont l’impact sur l’environnement est le plus faible, ou optimiser les processus d’approvisionnement pour réduire les déchets, éventuellement par des méthodes telles que l’approvisionnement juste à temps pour éviter les achats excessifs et le surstockage. Le rôle central des CPO efficaces est évident dans leur impact. Les entreprises dirigées par des CPO compétents constatent des réductions significatives de leur empreinte environnementale, ce qui démontre à quel point leur rôle est essentiel dans la gestion et l’atténuation des émissions de carbone. Ils sont en mesure d’identifier et de corriger les failles ESG dans la supply chain, influençant ainsi directement l’éthique ESG de l’entreprise.
Une stratégie cohérente du conseil d’administration en matière d’ESG À mesure que les entreprises élaborent leur plan ESG, la participation d’autres membres du conseil d’administration devient primordial. Les directeurs du marketing se défendent contre les accusations d’écoblanchiment, tandis que les directeurs des ventes et les responsables de la clientèle se penchent sur la mesure des émissions.
L’expertise des directeurs de la stratégie est nécessaire pour naviguer dans le réseau complexe des cadres réglementaires tout en intégrant les données ESG. Enfin, les directeurs des données et les directeurs de l’information deviennent inestimables, car ils exploitent de vastes quantités de données et veillent à ce qu’elles soient exactes et prêtes à être examinées.
Gouvernance : au-delà des rôles du conseil d’administration La gouvernance n’est pas statique - elle évolue. À mesure que l’ESG devient la responsabilité collective de toutes les parties prenantes, la responsabilité s’élargit. Cette approche dynamique accueille des individus passionnés, encourage l’innovation par des initiatives telles que les hackathons, tout en maintenant une méthode organisée. En substance, elle simplifie le développement durable et en fait un élément organique du tissu économique. Les entreprises doivent se concentrer sur l’intégration de la durabilité dans leur stratégie commerciale et cela doit être l’objectif de tous.
La gouvernance durable est l’avenir, et son intégration réussie repose sur un leadership fort de la part du conseil d’administration. Avec les directeurs financiers et les directeurs des systèmes d’information à la barre, les entreprises peuvent tracer une voie qui non seulement répond aux mandats ESG d’aujourd’hui, mais qui ouvre également à un avenir durable. La tâche peut s’avérer ardue, mais avec une collaboration interfonctionnelle et une structure de gouvernance adéquate, les entreprises peuvent adopter le développement durable dans son intégralité.