Quelque 40 000 tonnes de CO2 déjà séquestrées à 650 mètres sous terre à Ketzin, à 40 km de Berlin, des forages en cours sur deux sites du Brandebourg, près de la frontière polonaise, une installation pilote du suédois Vattenfall avec captage intégré dans la même région, une autre près de Cologne menée par RWE... En Allemagne, le captage et le stockage du carbone (CSC) avancent à grands pas. La centrale expérimentale de Vattenfall, démarrée il y a deux ans, est de faible puissance (30 MW thermiques). Elle ne produit pas d'électricité, mais permet de tester le procédé jusqu'au captage postcombustion. Le carbone est pour l'instant rejeté dans l'atmosphère ou revendu à l'agroalimentaire (pour gazéifier des eaux) et à l'industrie (sécurité incendie, pétrochimie). À court terme, il doit être stocké à Ketzin, où le centre de recherches géologiques Helmholtz injecte du CO2 sous terre depuis juin 2008.
À Jänschwalde, dans le même Land, une centrale de démonstration va entrer en fonction en 2015 sur un site existant, avec séquestration dans des sous-sols proches. Sa puissance s'élèvera à 300 MW, soit dix fois plus que le pilote, et cette fois-ci électriques. L'un des réacteurs fera appel au captage postcombustion, « plus approprié pour les installations existantes », explique Katharina Blömer, de Vattenfall. Un autre réacteur sera construit avec oxycombustion, « le meilleur procédé pour les nouvelles centrales ». L'énergéticien a entrepris, fin 2009, des explorations souterraines dans deux sites de la région à la recherche d'aquifères salins, l'un des sous-sols les mieux adaptés. Autre possibilité : enfouir le carbone dans des gisements gaziers en fin d'exploitation, pour en améliorer la récupération. Le centre Helmholtz évalue toutefois leur capacité de stockage à seulement 2,75 gigatonnes, contre 12 à 28 pour les aquifères salins.
À terme, Vattenfall veut parvenir à un coût de 20 à 25 euros la tonne de CO2 stockée (50 à 70 euros la tonne aujourd'hui selon l'Ademe). L'électricien suédois a investi environ 250 millions d'euros pour le développement du CSC. Auxquels s'ajouteront 1,5 milliard dans les années qui viennent. Des dépenses en partie subventionnées par l'Union européenne. Car l'entreprise va recevoir 180 millions d'aides au titre de l'European energy programm for recovering et s'est portée candidate pour le NER300, un projet de distribution de certificats d'émission de CO2 dont la revente doit financer le CSC. L'énergéticien escompte 300 à 500 millions supplémentaires.
Reste l'aspect législatif. Le projet de loi fédérale sur le CSC (transposition d'une directive de juin 2009) est en discussion avec les Länder, dont certains ont déjà manifesté leur opposition. En débat notamment, la durée de la responsabilité des groupes énergétiques pour le carbone stocké. Bruxelles prescrit un minimum de vingt ans. Le premier projet de loi allemand en indiquait trente. « Certains politiques demandent cent ans, assure la porte-parole de Vattenfall. Pour nous, c'est une question de coût. Selon la durée, les assurances deviendront peut-être trop chères. »