Le groupe multiplie les initiatives pour verdir ses produits. Qu'est-ce qui vous motive ?L'environnement est un engagement de longue date pour le groupe Seb. La direction du développement durable a été créée en 2005, une des premières dans des groupes de taille comparable. Notre engagement est formalisé à travers trois objectifs, fixés en 2013 : avoir réduit, en 2020, de 20 % la consommation énergétique de nos produits électriques, de 20 % la consommation énergétique de nos sites de production, de 20 % les émissions de dioxyde de carbone (CO2) liées au transport de nos produits, et intégrer 20 % de matière recyclée dans les nouveaux produits. Pour cela, nous avons mis en place une stratégie globale, qui touche à toutes les étapes du cycles de vie de nos produits, de la conception à la fin de vie en passant par la fabrication.L'écoconception, c'est assez classique aujourd'hui…On en parle beaucoup, c'est vrai. Mais la généraliser dans un groupe de 26 000 personnes, avec 29 usines et plusieurs marques, ce n'est pas simple. C'est une démarche que nous avons formalisée depuis cinq ans, et c'est aujourd'hui un standard.Nous avons animé avec la direction de l'environnement 36 sessions de formation dans le monde, et tous nos concepteurs sont désormais formés à l'écoconception. C'est grâce à ces mesures que nous avons pu concevoir des gammes de produits avec une consommation minimale, développé la réparabilité des produits ou l'intégration de matière recyclée.Quels sont vos leviers pour réduire les émissions de dioxyde de carbone ?L'impact carbone de nos usines est limité, du fait de nos processus industriels. Nous sommes surtout en pointe sur l'éco-logistique. Le transport des produits et composants représente une partie importante de notre bilan Carbone. Cela impacte jusqu'à la conception des produits. Réduire de quelques centimètres la taille d'un produit pour en mettre plus sur une palette, peut aboutir à la réduction des émissions de CO2 liées à son transport de 40 % ! Nous explorons aussi les transports alternatifs, comme le ferroviaire ou le fluvial, et des flottes de camions économes en carburant. En France, il y a beaucoup de possibilités dans le transport fluvial, avec des plates-formes multimodales pour les derniers kilomètres. Nous réfléchissons aussi à des routes directes entre nos usines et les distributeurs, ce qui demande un bon niveau de partenariat. Nous cherchons maintenant à développer ces modes de transport au niveau mondial. Fin 2016, nous aurons quasiment atteint notre objectif de réduction de 20 % de émissions de CO2, fixé pour 2020.Et sur les produits ?C'est évidemment un axe fort. Nous travaillons depuis 2008 à améliorer la réparabilité de nos équipements électriques, pour en augmenter la durée de vie. En 2015, nous annoncions que 86 % des produits de la marque Seb sont réparables, et 74 % chez Rowenta. Aujourd'hui, cet engagement s'étend à toutes les marques du groupe. Pour y parvenir, il fallu baisser le prix des pièces détachées, et garantir leur disponibilité 10 ans après la fin de la production. C'est plus difficile sur certains produits, comme les sèche-cheveux, un produit peu coûteux que nous ne fabriquons pas nous-mêmes.Mais les clients n'ont pas le réflexe de la réparation ?Dans nos centres de réparation agréés, le taux de réparation a augmenté de 25 % entre 2013 et 2015. La réparation est une filière d'avenir ! Le plus gros défi est maintenant de faire changer les mentalités. Pour cela, nous généraliserons dès septembre 2016 un logo « réparable 10 ans » sur les emballages de nos produits. Et nous mettons en ligne, sur internet, des petits didacticiels pour informer sur l'entretien des produits. Comment éviter les pannes sur un générateur vapeur en éliminant le calcaire, par exemple.Avec la location, vous testez un modèle vraiment original. Ça marche ?Nous testons l'économie de fonctionnalité, en proposant nos appareils en location depuis septembre 2015, sur Dijon. Les résultats sont assez intéressants. Il semble que certains consommateurs testent un appareil pour l'acheter ensuite, quand ils sont sûrs qu'ils vont l'utiliser régulièrement. Alors que nous avions surtout pensé que l'usage en serait occasionnel. Le bilan environnemental, sur lequel nous travaillons avec l'Ademe, sera finalisé ce mois-ci (juin 2016). Il n'est pas aussi favorable qu'on aurait pu le penser, car il dépend fortement du comportement. Si le consommateur couple course et location de l'appareil, le bilan est bon, mais pas s'il fait le trajet uniquement pour la location. Cela dit, ce service pourrait avoir un bilan très différent dans une agglomération comme Paris.Quid du bilan économique ?Nous y travaillons… Il dépend du seuil d'équipement. Cela dit, nous pouvons tester cette économie de fonctionnalité car nous avons précédemment travaillé sur la durabilité et la réparabilité de nos produits !L'hiver dernier, vous avez annoncé intégrer des plastiques recyclés dans vos appareils électriques. Où est innovation ?Intégrer du plastique recyclé n'est pas aussi simple qu'on croit. Nous, industriel, avons besoin de matière homogène, d'un bel aspect, et d'un coût compétitif. Or, les plastiques sont mal triés, et donc très mélangés. Nous avons travaillé, dans le cadre d'un partenariat avec Veolia et Eco-Systèmes, un éco-organisme de la filière des déchets électriques et électroniques (DEEE), pour créer une boucle fermée sur les équipements électroniques, où le plastique des DEEE est recyclé dans de nouveaux équipements électriques. Ce qui est facile à l'échelle du prototype ne l'est plus quand il s'agit de passer à l'échelle industrielle, qui implique des lots homogènes dans le temps. Nous avons cependant réussi à sélectionner du polypropylène, dans plusieurs catégories de couleurs, recyclé dans des pièces de structure et dans des pièces d'aspect. Il est mélangé avec du plastique vierge, notamment dans une centrale vapeur de Rowenta. Et en 2017, nous voulons doubler la quantité de plastiques recyclés, et les intégrer dans trois ou quatre catégories de produits.Quid de l'éventuelle présence de composés toxiques dans les plastiques recyclés ?Nous sommes très prudents sur ce sujet, et nous n'utilisons pas de plastique recyclé pour les pièces destinées au contact alimentaire.Selon vous, les consommateurs n'associent plus matériaux recyclés et qualité inférieure ?Jusqu'à présent, nous ne communiquions peu sur l'utilisation des plastiques recyclés, à cause de cette mauvaise image persistante, et la frilosité de certains clients sur ce sujet. Mais je pense que les choses sont en train de changer, et nous allons renforcer la communication sur l'utilisation de matières recyclées sur nos emballages. Après tout, nous le faisons déjà sur la gamme Natura ! Cela dit, je ne pense pas que promouvoir le plastique recyclé va devenir le critère principal d'achat d'un produit. Mais si ça donne une image environnementale positive des produits, à qualité et performance équivalente, tant mieux.Albane Canto