Un mois après le recours déposé par 84 élus, le Conseil constitutionnel déclare que la dérogation accordée aux néonicotinoïdes pour la culture de betteraves est conforme à la Constitution.
Il y a un mois, un recours déposé par plus de 80 députés au Conseil constitutionnel remettait en cause la dérogation accordée aux néonicotinoïdes jusqu’en 2023. Promulgué par le Sénat le 4 novembre, le retour de ces insecticides pourtant interdits par la loi Biodiversité de 2016 est censé sauver la filière betteraves, menacée par la jaunisse. Le recours n’aura pas convaincu le Conseil constitutionnel qui, dans sa décision du 10 décembre, « juge conforme à la Constitution, compte tenu de l’ensemble des garanties dont elle est assortie et en particulier de son application limitée exclusivement jusqu’au 1 er juillet 2023, la possibilité de déroger à l’interdiction d’utiliser des produits phytopharmaceutiques contenant des néonicotinoïdes. » S’il ne nie pas l’incidence des néonicotinoïdes sur la biodiversité, le caractère provisoire de la dérogation l’a conduit à la déclarer conforme à la Constitution.
Déception
Dans un communiqué de son mouvement Génération Écologie, la députée EELV des Deux-Sèvres Delphine Batho indique « prendre acte de la décision du Conseil constitutionnel » mais « ne [cache] pas [sa] déception, au regard de la grave régression que constitue la réhabilitation de ces poisons et de leurs conséquences monstrueuses sur les pollinisateurs, les oiseaux et bien d’autres espèces. » Elle craint notamment le risque que cette décision fasse jurisprudence et « délivre un permis de polluer » aux entreprises. Pour l’Union nationale de l’apiculture française, la décision est un « nouveau coup dur pour les abeilles ». Elle « entérine également l’incapacité de certaines filières à sortir de leur dépendance aux pesticides, malgré l’existence d’alternatives et l’urgence de protéger les insectes volants, dont les populations ont chuté de 75% ces 25 dernières années. » Le sujet a même fait l’objet d’un moratoire de l’Union européenne restreignant l’usage de trois néonicotinoïdes jugés néfastes pour les abeilles. Cette semaine, la Commission européenne a d’ailleurs demandé à l’Autorité européenne de sécurité des aliments de se pencher sur 21 autorisations d’urgence accordées par les États membres – dont la France – pour l’utilisation des néonicotinoïdes.
Génération Écologie prévoit des actions dans les prochaines semaines afin de militer pour l’abrogation de la loi Denormandie sur les néonicotinoïdes. De son côté, l’Unaf compte « poursuivre son combat juridique contre la réintroduction des néonicotinoïdes en France. »