Lou Gritzo, Vice-Président directeur de la recherche chez FM Global. Crédit : FM Global
Les entreprises peuvent s’approcher de la neutralité carbone en utilisant des équipements permettant de consommer des énergies renouvelables. Néanmoins, ces technologies peuvent être sujettes à différents risques (incendies, endommagement de pales…). Lou Gritzo, Vice-Président directeur de la recherche chez FM Global, revient ainsi sur les mesures nécessaires que peuvent prendre les entreprises pour minimiser ces risques.
Dans le contexte actuel d’urgence climatique, la pression sociétale et gouvernementale s’accroît pour réussir à décarboner l’économie mondiale. À ce jour, plus de 80 % du PIB mondial s’inscrit dans des objectifs de neutralité carbone. La consommation d’énergie dans le secteur industriel est la principale source d’émissions de gaz à effet de serre au monde (24,2 %), devant les bâtiments (17,5 %) et les transports (16,2 %).
Les entreprises peuvent réduire leurs émissions en utilisant des sources d’énergie renouvelables par le biais de panneaux solaires ou d’éoliennes, et en installant des systèmes de stockage d’énergie qui permettent de la consommer ultérieurement ou de la revendre aux opérateurs nationaux pour compenser les coûts d’exploitation. Ces dispositifs exposent néanmoins les entreprises à des risques spécifiques dont elles doivent tenir compte pour rester résilientes.
Panneaux solaires : risque d’incendie et risques liés au vent
Les panneaux solaires sont principalement exposés au risque d’incendie, en particulier les panneaux photovoltaïques montés en toiture. Si ce type d’installation n’est pas conçu, testé et certifié de manière appropriée, il peut entraîner une défaillance électrique du câblage ou des équipements, la chaleur générée déclenchant souvent un feu au niveau des supports des panneaux (s’ils sont fabriqués dans un matériau combustible comme le plastique) et/ou du revêtement situé sous les panneaux. La lutte contre le feu peut alors être très difficile, car l’accès est souvent limité et les panneaux doivent généralement être mis hors tension avant que les pompiers puissent intervenir.
Pour réduire ce risque, il est essentiel que les panneaux soient conçus et installés de manière à répondre à des standards de performance et de fiabilité électriques éprouvés, afin d’éviter la survenue d’un arc ou d’un court-circuit. De plus, ils doivent être testés et certifiés pour garantir que leur degré d’inflammabilité limitera la gravité d’un incendie potentiel.
Une fois installés, les panneaux solaires doivent présenter une surface libre de tout débris (feuilles, déchets ou autres matériaux combustibles) afin de limiter la propagation du feu en cas de défaillance. Un entretien régulier est donc à prévoir, ainsi que des inspections visuelles du câblage des panneaux.
Ces installations sont également vulnérables aux tempêtes et à la grêle. Des vents violents peuvent en effet endommager les panneaux et leurs supports. Dans les régions exposées au risque de grêle, la conception et la construction des panneaux doivent être adaptées pour éviter des dommages visibles ou des microfissures qui pourraient dégrader considérablement leur capacité à produire de l’électricité. Une autre solution consisterait à réorienter rapidement les panneaux vers le bas ou à les couvrir pour réduire les impacts de grêlons.
Éoliennes : risques d’incendie, d’endommagement des pales et d’effondrement
Avec l’amélioration de la technologie et des matériaux, la taille et la capacité de production des éoliennes ne cessent d’augmenter. Mesurant désormais jusqu’à 300 mètres de hauteur, elles sont plus exposées au risque de bris et représentent un risque plus important pour les installations situées à proximité.
Les grandes éoliennes sont particulièrement vulnérables aux mouvements du sol, à la corrosion des métaux présents dans les fondations et aux vents extrêmes (lorsque les pales ne sont pas immobilisées assez tôt pour éviter la survitesse) qui, dans le pire des scénarios, peuvent entraîner l’effondrement du mât.
En outre, des fluides hydrauliques et d’autres liquides inflammables sont présents dans la nacelle abritant le générateur. En cas de fuite, même minime, ces liquides peuvent prendre feu sous l’effet d’une surchauffe ou de la foudre. La grêle peut aussi causer des dommages considérables en raison de sa vitesse d’impact sur les pales.
Ces différents risques doivent être pris en compte dès la conception, la fabrication et le choix du lieu d’implantation des éoliennes, puis lors des inspections de maintenance.
Dispositifs de stockage d’énergie : risques de surchauffe et d’incendie
De nombreuses entreprises productrices d’énergie renouvelable investissent dans des dispositifs qui leur permettent de stocker cette énergie sous forme d’électricité afin d’alimenter des systèmes et équipements fonctionnant habituellement avec des moteurs à combustion interne. Les batteries au lithium-ion représentent l’une des solutions de stockage les plus courantes et les plus efficaces.
Leur capacité à stocker de grandes quantités d’énergie de manière rentable explique leur usage croissant dans l’industrie. Elles présentent néanmoins un certain nombre de risques, le plus grave étant l’emballement thermique. Ce phénomène est lié à la surchauffe d’une batterie, potentiellement due à un court-circuit, qui entraîne une surchauffe des batteries voisines et in fine un incendie. Ce type de feu peut être très difficile à maîtriser en raison de la présence d’électricité et des gaz combustibles qui continuent à être libérés longtemps après le début de la surchauffe.
Pour se prémunir contre ce risque, les entreprises doivent s’assurer que leurs systèmes de stockage d’énergie sont testés afin de certifier leur capacité à limiter l’emballement thermique. Il est également recommandé de former plusieurs bancs de batteries espacés les uns des autres, de manière à garantir l’efficacité des systèmes sprinkleur automatiques et de l’intervention des pompiers. Dans la mesure où elles ne contiennent pas de lithium sous sa forme primaire, l’utilisation d’eau n’induit pas de risque d’explosion supplémentaire.
À l’avenir, la recherche de la neutralité carbone va continuer d’exercer une influence croissante sur les choix stratégiques et les modes de fonctionnement des entreprises, qui ont un rôle essentiel à jouer dans cette transition. Elles devront néanmoins veiller à accompagner toutes les mesures destinées à améliorer leur impact environnemental d’une gestion des risques adaptée et rigoureuse.