La priorité de l'année pour l'Inspection des installations classées est l'achèvement de la mise en oeuvre de la directive IPPC. Clé de voûte du droit européen en matière de prévention des risques chroniques liés aux établissements industriels et d'élevage, la directive 96/61/ CE codifiée par la directive 2008/1/ CE du 15 janvier 2008, dite IPPC (Integrated pollution prévention and control), est en cours de révision. La plupart des principes qui y sont inscrits existaient déjà dans la réglementation sur les installations classées. Mais « ses implications en termes de charges et de méthodes de travail ont certainement été sous-estimées », confie Guy Mottard, du Service des risques technologiques de la Direction générale de la prévention des risques au Meeddm.
Finalement, « tous les documents européens pour la mise en oeuvre des meilleures techniques disponibles (les documents Bref) n'ont été disponibles qu'en 2006 ». La directive IPPC concerne certaines installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) relevant du régime d'autorisation. Ses exigences se traduisent par l'obligation, pour les responsables de ces installations, de réaliser un bilan de fonctionnement décennal. Au 25 février dernier, les autorisations d'exploitation de 670 des 6 500 installations classées françaises soumises à l'IPPC n'étaient toujours pas conformes à la réglementation. Mise en demeure par la Commission européenne le 29 octobre 2009 pour ce retard, la France s'est engagée à terminer les réexamens de toutes les autorisations avant la fin de l'année.
À l'image de la France, nombre d'États membres ont rencontré des difficultés d'application. Dès 2005, la Commission a donc envisagé la révision de cette directive. Et elle adoptait, le 21 décembre 2007, une proposition de directive baptisée IED (Industrial Emissions Directive) qui refond en un acte réglementaire unique sept directives relatives aux émissions industrielles. Le Conseil adoptait sa position commune sur ce projet, en première lecture, le 15 février dernier. Et le Parlement procède actuellement à la deuxième lecture. Sans retard de procédure, son adoption est attendue pour la fin de l'année, voire le début de l'année prochaine.
Consolider la notion de meilleure technique disponible (MTD) est au coeur de la révision. D'une part, « plus précise dans ses dispositions, la proposition de directive IED pose clairement les Bref (Best available techniques reference document) comme référence unique pour la mise en oeuvre des MTD », explique Guy Mottard. D'autre part, le périmètre d'application s'étend. « La réglementation IPPC devient le creuset de l'action européenne en matière de réduction des émissions de polluants par l'industrie », assure Jean-Marc Brignon, responsable de l'unité économie et aide à la décision, de l'Ineris. « Pour atteindre les objectifs de la directive-cadre sur l'eau, on s'appuie aussi sur la réglementation IPPC. De même lorsqu'on travaille sur le règlement Reach », éclaire-t-il.
Par cet acte unique, la Commission entend « simplifier la réglementation et clarifier son champ d'application », explique Anne Cikankowitz, ingénieur de recherche à l'Ifremer, à Nantes. Outre la directive IPPC, la proposition de refonte concerne trois directives relatives aux déchets et aux rejets provenant de l'industrie du dioxyde de titane (78/176/CEE, 82/833/ CEE et 92/112/CEE), la directive sur les composés organiques volatiles (1999/13/CE) et celle sur l'incinération des déchets (2000/76/CE). Pour Hubert de Chefdebien, président du Syndicat national des concepteurs et constructeurs des industries du déchet et de l'environnement ( Snide), « incorporer la directive Incinération, sans grande modification sur le fond, va juste rendre la réglementation plus difficile à lire ».
En réunissant ces textes, la Commission pointe une incohérence : les valeurs limites d'émission inscrites dans la directive relative aux polluants émis par les grandes installations de combustion (2001/80/CE), dite directive GIC, sont moins exigeantes que les niveaux d'émissions à respecter selon la directive IPPC. La proposition de directive IED prévoit donc d'inclure la directive GIC, en durcissant les valeurs limites, en accord avec la réglementation IPPC. D'autres activités devraient entrer dans le champ d'application de cette réglementation, parmi lesquelles « la fabrication de panneaux à base de bois (lire encadré), la préservation du bois au moyen de produits chimiques pour une capacité de production supérieure à 75 m3/jour, le traitement des eaux résiduaires à majorité industrielles dans des stations d'épuration indépendantes, ainsi que de nombreuses activités liées à la gestion des déchets », liste Guy Mottard.