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POLLUTIONS

Illégalité de la « taxe trottoir  » : l'occupation momentanée du domaine public ne dépasse pas le droit d'usage

PUBLIÉ LE 1er FÉVRIER 2014
LA RÉDACTION
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Caa de Marseille 26 juin 2012 M. A., sté la brioche chaude et sté Aux délices d'Anaïs n° 11MA01675 et n° 11MA01676 Jugée légale par le tribunal administratif de Nîmes, la « taxe trottoir » instituée par la ville d'Avignon pour l'occupation de son domaine public par les clients de distributeurs bancaires ou de commerce de vente de sandwich, a été annulée par la cour administrative de Marseille qui a considéré que l'occupation momentanée du domaine public à l'occasion de la vente d'un sandwich ou d'un retrait d'argent ne dépassait pas le droit d'usage appartenant à tous. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2122-1 du Code général de la propriété des personnes publiques : « Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous. » ; qu'aux termes de l'article L. 2125-1 du même code : « Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 donne lieu au paiement d'une redevance (…) » ; qu'aux termes de l'article L. 2125-3 dudit code : « La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation. » ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la redevance d'occupation ou d'utilisation du domaine public correspond à la rémunération du droit d'occupation ou d'utilisation privative de la dépendance concernée dudit domaine, droit qui est accordé, par la personne publique propriétaire ou gestionnaire, par la délivrance d'une autorisation expresse à cet effet ; qu'en outre, une personne publique est fondée, le cas échéant, à réclamer à l'occupant ou à l'utilisateur irrégulier de son domaine public, c'est-à-dire dépourvu de titre bien que soumis à autorisation, le versement d'une indemnité compensant les revenus qu'elle aurait pu percevoir d'un occupant régulier au titre de la période d'occupation ou d'utilisation privative irrégulière ; qu'en revanche, l'utilisation d'une dépendance du domaine public d'une personne publique dans les limites ne dépassant pas le droit d'usage qui appartient à tous ne nécessite la délivrance d'aucune autorisation et ne donne pas lieu à assujettissement au paiement d'une redevance au titre de cette utilisation ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'utilisation, le temps d'une transaction, de la dépendance du domaine public de la commune d'Avignon constituée par les trottoirs bordant les voies publiques de ladite commune et normalement affectée à la circulation générale des piétons, par les clients des établissements bancaires disposant de distributeurs automatiques bancaires installés en façade de bâtiment et accessibles directement depuis ledit domaine public, ainsi que de tous les commerces pratiquant des ventes ou activités diverses au travers de vitrines ou de comptoirs ouvrant sur le même domaine, présente un caractère momentané ; qu'une telle utilisation du domaine public, non privative, ne dépasse pas le droit d'usage qui appartient à tous et ne requiert pas ainsi la délivrance par la commune d'une autorisation ; que, dès lors, s'il est constant que ladite utilisation du domaine public communal concourt à l'exercice par les établissements concernés d'une partie de leurs activités commerciales et économiques, elle ne peut toutefois donner lieu à l'assujettissement desdits établissements au paiement d'une redevance d'utilisation du domaine public ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges ont retenu que le conseil municipal de la commune d'Avignon avait pu à bon droit instaurer, par la délibération contestée, la redevance litigieuse ; Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens des requêtes que, M. A et autres et Mme B sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune d'Avignon en date du 21 octobre 2010 en tant que cette délibération instaure une redevance d'utilisation du domaine public pour tous distributeurs automatiques bancaires installés en façade de bâtiment et accessibles directement depuis le domaine public ainsi que pour tous les commerces pratiquant des ventes ou activités diverses au travers de vitrines ou de comptoirs ouvrant sur le domaine public et à demander l'annulation dans cette mesure desdits jugements et délibération. COMMENTAIRE La présente espèce constitue le nouvel épisode, devant la cour administrative d'appel de Marseille (1), de l'affaire dite de la « taxe Kébab » ou « taxe trottoir » que le conseil municipal d'Avignon avait institué en octobre 2010 à destination des établissements bancaires en raison de l'utilisation du domaine public par les clients de leurs distributeurs automatiques de billets, ainsi que des commerces de vente de sandwichs qui ne disposent pas d'espace consacré permettant d'accueillir leurs clients. Contestée par ses destinataires, la délibération créant cette redevance d'occupation du domaine public avait pourtant été jugée légale par le tribunal administratif de Nîmes dans son jugement du 3 mars 2011 au prix d'une lecture extensive de l'article L.2125-1 du Code général de la propriété des personnes publiques (ci-après Cg3p) et dont nous avions salué l'audace dans ces colonnes (2). En effet, les juges nîmois avaient considéré « qu'une redevance peut être mise à la charge des personnes qui utilisent ou occupent le domaine public et ne sont, au demeurant, assujetties à aucun régime d'autorisation ». Partant, analysant les pratiques des banques et des commerces, ils en avaient déduit qu'« indépendamment du simple droit d'accès tiré de la qualité de riverain de la voie publique, les personnes qui ne peuvent exercer leur activité lucrative et réaliser les opérations matérielles de vente ou de transaction que parce que leur clientèle stationne temporairement sur la voie publique devant leur établissement doivent être regardées comme utilisant pour elles-mêmes le domaine public ». Nous avions terminé notre commentaire en indiquant que le jugement avait fait l'objet d'un appel ; nous y voilà donc. Force est de reconnaître une certaine déception à la lecture de l'arrêt de la cour qui, par une application classique des règles de la domanialité, a fait, en quelque sorte, rentrer dans le rang le tribunal administratif de Nîmes en annulant son jugement et en jugeant au contraire illégale la délibération adoptée par le conseil municipal d'Avignon. Pourtant, au vu des arguments avancés par la cour, nous sommes plutôt enclin à défendre la solution jugée à Nîmes. Pour juger illégale cette délibération, la juridiction marseillaise a rappelé avec force l'existence d'un lien étroit entre occupation ou utilisation du domaine public et titre d'occupation du domaine public (I) et a considéré que l'occupation momentanée du domaine public à l'occasion de la vente d'un sandwich ou d'un retrait d'argent ne dépassait pas le droit d'usage appartenant à tous (II). I. L'occupation ou l'utilisation du domaine public nécessite un titre d'occupation C'était sur ce point que le jugement de Nîmes présentait toute son originalité. Il avait en effet totalement déconstruit le syllogisme sur lequel est bâti le régime de l'usage du domaine public. Le fait d'occuper le domaine public dans des limites dépassant l'usage de tous nécessite un titre d'occupation, c'est ce qu'indique l'article L.2122-1 Cg3p. Le fait de disposer d'un tel titre fait de son bénéficiaire un occupant privatif du domaine public. À partir de là, et selon l'article L.2125-1 Cg3p, l'occupation du domaine public donne lieu au paiement d'une redevance. Mais les juges du fond ont vu une faille dans cette construction par la référence régulière que fait le Code aux deux termes « occupation » et « utilisation ». On l'a dit dans notre précédent commentaire, la doctrine les a toujours compris comme étant synonymes, mais ce n'est pas le cas du tribunal de Nîmes. Ce dernier a procédé à une dissociation des deux. Si les établissements bancaires, sandwicheries et autres vendeurs de kebab n'occupent pas effectivement le domaine public expliquant ainsi qu'il ne leur soit pas exigé de titre d'occupation, ils utilisent néanmoins le domaine public à des fins commerciales fondant ainsi la perception d'une redevance. La cour d'appel a, dira-t-on, remis de l'ordre dans tout cela. Les conclusions extrêmement pédagogiques et fort documentées, de son rapporteur public, Samuel Deliancourt, sont explicites, « le tribunal administratif de Nîmes a jugé en première instance que les commerces concernés par la redevance dont s'agit ne bénéficient d'aucune autorisation d'occupation ou d'utilisation de la voirie ; qu'ils n'ont d'ailleurs nul besoin d'en détenir une. Il s'agit là d'une erreur de droit. Ils ont au contraire besoin d'une telle autorisation ». S'ils ont besoin « au contraire » d'une autorisation, c'est que l'utilisation est synonyme d'occupation. Et le rapporteur de continuer, « nous pensons qu'occupation et utilisation sont synonymes et doivent être regardées, historiquement comme juridiquement, comme équivalents. Le jugement est pour ce motif entaché d'une seconde erreur de droit ». La cour administrative d'appel de Marseille enfonce, à cet égard, le clou en prenant bien soin de faire référence aux deux en ces termes, « la redevance d'occupation ou d'utilisation du domaine public correspond à la rémunération du droit d'occupation ou d'utilisation privative de la dépendance concernée dudit domaine », alors que formellement, l'expression redevance d'utilisation du domaine public est rarement employée sauf en matière d'utilisation de fréquences radioélectriques (3). On pourrait gloser à l'infini, comme sur le sexe des anges, sur la question de savoir si utilisation et occupation sont synonymes. Même si tout le poids de la doctrine pèse en ce sens (4), l'argument avancé par le rapporteur public ne nous paraît pas convaincant. Pourquoi faire appel à l'histoire au risque d'avoir une lecture figée des règles de la domanialité alors que la référence dans les textes à ces deux termes permet d'en avoir, au contraire, une lecture dynamique et davantage en phase avec les aspirations actuelles du législateur et des personnes publiques tendant à une valorisation toujours plus grande du domaine public ? Après tout, s'ils étaient synonymes, les textes emploieraient indistinctement l'un ou l'autre sans motifs particuliers. Or tel n'est pas le cas, contrairement à ce qu'affirme le rapporteur public, chaque disposition du Cg3p faisant référence à l'occupation, fait aussi, et systématiquement, référence à l'utilisation. Est-ce, d'un point de vue linguistique, utile d'utiliser à chaque fois et dans chaque phrase les deux termes s'ils sont réellement synonymes ? En outre, pourquoi dire que juridiquement c'est la même chose au motif que leur régime est identique ? C'est là un raisonnement tautologique qu'il est facile d'invalider en renversant la perspective et en disant que les deux notions sont en réalité différentes dès lors que l'on décide de les soumettre à un régime différent : l'occupation nécessite un titre d'occupation, l'utilisation n'en nécessitant pas nécessairement. Mais toutes deux se rejoignent par l'exigence d'une redevance dès lors que l'utilisation qui est faite du domaine public dépasse l'usage que tout un chacun pourrait en faire librement. C'est également sur ce point que la cour administrative d'appel de Marseille et le tribunal administratif de Nîmes ont eu une appréciation divergente. II. L'occupation momentanée du domaine public ne dépasse pas le droit d'usage appartenant à chacun Dans notre commentaire du jugement initial nous avions écarté cette hypothèse d'un revers de phrase (5), c'est pourtant sur ce point que le raisonnement adopté par la cour a été déterminant pour juger illégale la délibération du conseil municipal d'Avignon. Partant du principe qu'aucun titre d'occupation du domaine public n'avait été accordé aux commerçants et aux établissements bancaires, les juges marseillais se sont interrogés sur la nature de l'usage qui était fait du domaine public. Si, sur le fondement de l'article L.2121-1 Cg3p, l'usage avait dépassé le droit appartenant à chacun, il se serait agi d'un usage privatif justifiant qu'une redevance soit exigée en retour. Dans le cas contraire, aucune redevance ne se justifiait. C'est à cette conclusion que la cour est parvenue. Au prix d'un raisonnement, que l'on jugera quelque peu spécieux, la cour administrative d'appel de Marseille a en effet estimé que « l'utilisation, le temps d'une transaction, d'une dépendance du domaine public (…) présente un caractère momentané (qui) ne dépasse pas le droit d'usage qui appartient à tous ». Elle en a ainsi déduit que « ladite utilisation (…) ne peut toutefois donner lieu à l'assujettissement desdits établissements au paiement d'une redevance d'utilisation du domaine public », tout en reconnaissant que cette utilisation « concourt à l'exercice par les établissements concernés d'une partie de leurs activités commerciales et économiques ». Le terme de spécieux peut paraître sévère c'est pourtant celui qui vient à l'esprit surtout à la lumière des conclusions de son rapporteur public qui a été suivi en tout point. Ce dernier a convaincu la juridiction que l'usage qui était fait ici du domaine public ne se différenciait guère de celui des « personnes qui attendent sur le trottoir l'ouverture d'un cinéma ou d'un supermarché ou qui attendent leur tour pour entrer les jours de forte affluence, les fumeurs obligés de sortir des lieux de restauration pour fumer, les sorties d'églises et de temples, etc. Et pourquoi pas le passant, ou la passante faisant du lèche-vitrine mais qui reste un peu trop devant la devanture se demandant si elle entre et achète ou pas ». De ce point de vue, ce raisonnement peut paraître convaincant sauf qu'il se trompe de sujet, de point de vue justement. Certes, celui qui occupe le domaine public est tenu au versement d'une redevance, celui qui en fait un usage ne dépassant le droit de chacun n'est pas soumis à la même obligation. Mais qui paie en réalité cette redevance ? Est-ce le client qui s'arrête sur une terrasse d'un débit de boisson, installée sur une place publique ou un trottoir, pour prendre un café ? Certes non, alors que c'est bien lui qui fait un usage momentané du domaine public. En revanche, c'est le cafetier qui en sera le débiteur parce qu'il fait un usage permanent de l'espace public à des fins commerciales par l'installation de sa terrasse. Autrement dit, l'examen opéré par le rapporteur public puis par la cour sur le caractère permanent ou non de l'usage du domaine public conduit à se tromper de sujet. Il ne s'adresse pas à la bonne personne. Ce n'est pas du point de vue du client que l'on doit examiner le caractère permanent ou non de l'usage, mais bien de l'opérateur économique qui a installé ici une terrasse, là un distributeur automatique de billets, plus loin un comptoir de vente. Quelle différence substantielle y a-t-il ce faisant entre l'usage fait par le cafetier de l'espace public et celui par l'établissement bancaire ou le vendeur de kebab ? Aucun, nous semble-t-il. Des clients arrivent et repartent : qui achète un sandwich, qui retire de l'argent, qui prend un café, une partie du domaine public est occupée dans tous les cas. Dans toutes ces situations, du point de vue du commerçant, l'usage du domaine public est le même, il est permanent du moins durant les heures d'ouverture des différents établissements voire véritablement permanent pour les distributeurs automatiques de billet. à cet égard, le raisonnement adopté par la cour s'écarte de celui suivi par le Conseil d'État dans l'affaire Syndicat des artisans fabricants de pizzas non sédentaires Provence-Alpes-Côte d'Azur, lequel est bien préférable parce qu'il conduit à examiner l'usage du domaine public du point de vue du redevable. Ainsi, c'est en toute logique qu'il a jugé que « le versement d'un droit de stationnement ne peut être exigé des professionnels ambulants circulant sur les voies publiques en quête d'acheteurs lorsqu'ils se bornent à s'arrêter momentanément pour conclure une vente » (6). à l'inverse, il est bien fait dans l'espèce commentée une utilisation du domaine public qui dépasse le droit d'usage de chacun. Dès lors, la solution défendue par le tribunal administratif de Nîmes avait du sens parce qu'elle conduisait à placer dans une même situation les divers commerçants, qu'ils occupent ou utilisent le domaine public. On peut regretter que celle opposée par la cour administrative d'appel de Marseille n'ait pas la même audace…
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