La pollution de l'air susceptible d'avoir pour origine un projet industriel ne s'arrêtera plus à la frontière entre France et Allemagne. Un outil en ligne permet enfin de l'évaluer dans la région de Strasbourg. « Il optimise le volet air d'une étude d'impact liée à la demande de création ou de modification d'une installation classée (ICPE) en zone frontalière, en tenant compte des procédures prévues par la législation du pays voisin », résume Joseph Kleinpeter, directeur de l'Association de surveillance et d'étude de la qualité de l'air en Alsace (Aspa). Dans le cadre du projet européen Interreg Atmo-Idee de 741 600 euros, l'Aspa a piloté l'énorme travail d'inventaire préalable des émissions, d'harmonisation des données et de comparaison des procédures d'autorisation française et allemande. Avec pour résultat, un outil bilingue baptisé, lui aussi, Atmo-Idee. Il procède par étapes. Il visualise d'abord le périmètre d'impact — le rayon d'affichage dans le cas français — pour vérifier s'il déborde de la frontière. Puis il dresse la situation initiale de la qualité de l'air pour treize polluants (NO2, PM10, SO2, benzène, méthane, COV non métalliques…) en se référant à une notion de criticité de la loi sur l'air allemande : tel est le cas si une émission atteint 85 % de la valeur limite du polluant. Dans un troisième temps, Atmo-Idee intègre les estimations des rejets atmosphériques du projet, calculées par un bureau d'études à partir du dossier de l'étude d'impact. Ceci permet ensuite de repérer les émissions supplémentaires de polluants, puis de conclure s'ils entraînent ou non un dépassement des normes de qualité de l'air. Précieuses pour les experts (administrations instructrices des dossiers, commissaires-enquêteurs d'enquête publique…), les données sont aussi aisément compréhensibles par les associations de protection de l'environnement, grâce à un tableau synthétique par pictogrammes. Juste retour des choses, car Atmo-Idee est née de la volonté d'organisations citoyennes, en premier lieu le secrétariat permanent pour la prévention des pollutions industrielles (S3PI) Strasbourg-Kehl. « Il isole bien l'impact lié à un projet au regard de la pollution de fond. Il objective les données sur un sujet qui se prête à toutes les rumeurs », approuve son président Lothaire Zilliox. Les partenaires définiront dans les prochaines semaines le degré d'accès du public aux informations. « Les détails restent à arrêter, mais l'esprit sera bien une ouverture large au public », promet Joseph Kleinpeter. Depuis Strasbourg, l'outil a vocation à essaimer vers d'autres zones transfrontalières franco-allemandes. Mais il s'applique aisément à un projet franco-français. l