Faire preuve d'exemplarité. Tel est le message qui a été délivré au cours des trois jours de la convention du Bureau International du Recyclage qui s'est tenu à Berlin fin mai. Si cette manifestation printanière est utile pour entretenir son réseau et développer son business hors frontières, elle permet également d'assister à l'euphorie ou au contraire à la morosité de l'activité. L'édition 2016 a surtout servi à évoquer une année 2015 extrêmement difficile et une profession paradoxalement malmenée.Alors que l’économie circulaire est placée sur un piédestal à l'échelle européenne, le recyclage continue d'évoluer dans une économie capitalistique. Cela en désole plus d'un aujourd'hui, mais ne dérangeait personne avant 2008, lorsque tous les indicateurs étaient au vert, annonciateurs de gains énormes. Au-delà de ces considérations, il n'en reste pas moins que l'économie circulaire encensée par les politiques a encore du mal à dominer l'industrie du recyclage. Invité d’honneur du BIR 2016, Klaus Töpfer, ancien ministre allemand de l'Environnement, père fondateur du Point Vert, a insisté sur la nécessité de créer un modèle qui place les matières premières secondaires au cœur des enjeux. Pourtant, que ce soit dans les filières des métaux ferreux et non ferreux, les papiers ou les textiles, la matière issue du recyclage est confrontée aux surcapacités de production de matières premières, à une évolution baissière générale des prix et à une concurrence chinoise.Le marché des ferrailles illustre parfaitement le sujet mais il n'est pas le seul. Pour s’en sortir, le recyclage n'a pas d'autre choix que de miser sur une qualité exemplaire, parfois très contraignante. Sur un marché mondial, où la demande recule, la production est en surcapacité et les volumes collectés ne sont plus rentables, les investissements nécessaires pour satisfaire cette qualité ne sont pas envisageables pour bon nombre de PME. Klaus Töpfer, qui a intégré la présidence du PNUE au Kenya, est conscient que les programmes d'investissement dans la R&D et l'industrie sont indispensables au développement du recyclage, mais aujourd'hui insuffisants. En Europe comme ailleurs, en Afrique où l'outil industriel dans le recyclage des DEEE ou des VHU manque cruellement. Restons d'ailleurs sur ce continent avec la filière des textiles usagés. Là aussi, le monde change mais il ne suffit pas d'en être le spectateur. Plusieurs pays africains ont choisi de développer leur propre industrie textile. Tout à leur honneur. Ce qui l'est moins, c'est de décider sous prétexte de limiter la concurrence, de bannir les importations de fripes provenant principalement d'Europe. Une mesure dans ce sens pourrait voir le jour à partir de 2019. Avec en perspective : des taxes douanières dissuasives sur les vêtements d'occasion, pourtant très consommés en Afrique. Et finalement une décision politique sans concertation préalable avec l'ensemble des opérateurs, qui bénéficie avant tout aux produits chinois pas chers et bas de gamme. La question de la qualité est au coeur du secteur. Si comme ici, on ne vante pas la qualité intrinsèque de la fripe versus vêtement low-cost chinois ; si a contrario, on ne fait pas l'effort d'un tri plus approfondi des plastiques et des métaux répondant aux attentes des clients, le recyclage risque de  « survivre » encore longtemps.