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Déchets dangereux : une filière au bord de l'explosion

PUBLIÉ LE 18 AOÛT 2016
LA RÉDACTION
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Dès le démarrage de la filière REP sur les déchets dangereux spécifiques (DDS), il était prévisible qu’elle serait boiteuse : elle s'appuie en effet sur une ligne de démarcation imaginaire entre déchets ménagers et non ménagers. C’est une gageure de distinguer, parmi les pots de peintures, colles, solvants, déboucheurs d’évier et autres toxiques jetés par les ménages,ceux entrant dans le dispositif de la REP, des déchets souvent strictement identiques mais détenus par des professionnels, et donc hors REP. « Trier les déchets selon la nature du détenteur, c’est impratiquable », plaide Alexandre Breuil, responsable de l'unité traitement valorisation matière du Grand Lyon. « Les seules caractéristiques connues, en déchèteries, concernant un usager, ce sont le véhicule utilisé et la fréquence de visites. »De fait, sur le terrain, les collectivités ont le plus grand mal à séparer les 9 familles de produits concernés, selon au total environ 250 critères. « La liste des produits relevant ou pas de la REP est ubuesque et truffée de pièges », remarque Frédéric Lamouroux, directeur de Sud Rhône Environnement, un syndicat de traitement situé du Gard. Il faut séparer les pots de peinture selon leur taille en faisant attention aux effets promos (un pot promotionnel contenant 20 % de produit supplémentaire est ainsi susceptible de basculer en “non ménager”), l’antigel d’hiver de l’antigel d’été, les produits de piscine des produits stabilisateurs de pH, le polish voiture du shampoing voiture, les enduits intérieurs des bâtiments des enduits extérieurs… Le ministère de l’Environnement vient de réviser le texte listant les produits relevant de cette filière : l’arrêté du 6 février 2016 corrige quelques unes des aberrations mentionnées, mais sur le fond, le problème reste entier.Face aux difficultés rencontrées par les collectivités, EcoDDS, l'éco-organisme en charge de l'enlèvement des DDS et finançant leur élimination, réagit d’une façon très dogmatique et très dure : zéro tolérance, des procédures standards automatiques, quasiment pas de dialogue… Pierre-Olivier Charlemagne, son délégué général, a d'ailleurs refusé de répondre à nos questions. Dans un premier temps, entre fin 2014 et le premier semestre 2015, l’éco-organisme a suspendu les enlèvements lorsqu’il jugeait les non-conformités trop élevées (présence de produits hors-seuils, de produits non-contribuant à la filière, etc.). Les collectivités se sont alors retrouvées avec leurs déchets sur les bras. Le Smicval du Libournais Haute-Gironde a ainsi connu deux mois de suspension, sur quatre déchèteries. Le Grand Lyon, deux mois et demi, sur six sites. Dans les Vosges, six déchèteries ont connu la suspension, de quelques semaines à quelques mois. Ont aussi été concernés les Communautés d’agglomération d’Orléans Val de Loire et de Vannes, le Grand Avignon, les métropoles de Toulouse, Nantes et Lille, le Syelom (92), Tryfil (81), le Sevadec (62), Sud Rhône Environnement (30)… Nombre de ces collectivités, soutenues par Amorce, estiment que le dispositif précontentieux mentionné au contrat en cas de déchets indésirables n’a pas été respecté. Il prévoit qu’à la suite de deux refus de conteneurs consécutifs sur une période de 60 jours, la collectivité présente des mesures correctives, et c’est en cas de « persistance de difficultés significatives » après ce délai que l’éco-organisme peut mettre en demeure la collectivité de remédier aux manquements, avec suspension le cas échéant. « Dans les Vosges, chaque suspension a eu lieu avant la fin des 60 jours », affirme Benoît Jourdain, président du SMD des Vosges.Difficulté supplémentaire : aucun seuil n’a été établi pour les non-conformités. Par exemple, il est arrivé qu’une caisse contenant des centaines d’aérosols soit déclarée non-conforme pour un seul et unique produit mal trié. « Le déclenchement des non-conformités semble très subjectif, dépendant de chaque opérateur », constate Nicolas Roussat, responsable du pôle déchets à Amorce, qui se demande, d’ailleurs, « quel rôle jouent les prestataires, de façon volontaire ou contrainte, dans les difficultés rencontrées sur cette filière ». Au second semestre 2015, les suspensions de collecte se sont raréfiées. Au profit d'une nouvelle technique : EcoDDS applique, de façon systématique semble-t-il, des pénalités financières au titre des non-conformités enregistrées au cours de l’exercice. En ce début d’année 2016, les collectivités découvrent la mauvaise surprise, en recevant leur notification de soutiens pour l’année 2015. Elles se voient appliquer des réfactions pour l’élimination des produits non-conformes et pour “frais de gestion”. Certaines collectivités acceptent bon gré mal gré ces retenues pour être tranquilles, mais d’autres sont prêtes à aller au contentieux.L’année dernière, des collectivités ont déjà refusé qu’EcoDDS leur défalque des sommes sur les soutiens dus pour l’exercice 2014. Elles ont émis un titre de recettes “complet” pour percevoir la totalité des soutiens, faisant fi des réfactions imposées par l’éco-organisme. Frédéric Lamouroux, le directeur d’un des syndicats ayant procédé de la sorte, pointe « l’absence d’éléments contradictoires » dans les non-conformités, et l’impossibilité de se faire retourner les déchets contestés, ne serait-ce qu’à des fins pédagogiques. « Ces retenues ne sont pas prévues au contrat, point », indique de son côté Eric Buffo, directeur général adjoint du Smicval du Libournais. Ce dernier a même émis un second titre de recettes pour obtenir le remboursement des dépenses qu’il a engagé, pendant la période de suspension des collectes, pour éliminer les déchets “contribuant” de la REP. Le retrait ou l’annulation d’un titre exécutoire ayant été émis ne pouvant avoir lieu que sur décision d’un juge, EcoDDS a assigné ces collectivités. Les sommes en jeu sont d’environ 500 euros pour Sud Rhône Environnement, 8000 euros pour le Smicval du Libournais (et 11800 euros dans le cadre de sa seconde affaire). Pour l’instant, les décisions rendues l’ont été sur la forme : au TI ou au TGI, le juge se déclare incompétent et renvoie devant un tribunal administratif. La décision du tribunal de Libourne du 13 janvier 2016 mentionne toutefois que « le contrat paraît avoir une nature administrative », ce qui a fait couler beaucoup d’encre. En tous cas, on peut s’attendre à ce que le conflit bascule cette année, pour d’autres collectivités, sur le terrain juridique. Soit en vertu du même processus de refus des réfactions, soit, pourquoi pas, via un recours d’une ou plusieurs collectivités contre EcoDDS pour non respect des dispositions contractuelles. Au fond, on peut se demander pourquoi certaines déchèteries rencontrent moins de difficultés que d’autres. De l’avis général, même si elles ont tardé à être dispensées, les formations proposées par l’éco-organisme sont de qualité. Les questions de remplacement de gardiens, etc., ne peuvent expliquer, à elles seules, un problème d’une telle ampleur. Bien sûr il y a des installations qui accueillent pas ou peu de déchets professionnels, qui sont peu fréquentées (un gardien débordé aura plus de difficultés à séparer correctement les flux). La taille du local DDS  entre aussi en ligne de compte, le manque de place augmentant les risques d’erreurs. Mais pour « acheter la paix », certaines collectivités ont fait l’acquisition d’une deuxième armoire, recruté du personnel supplémentaire… Le Smitom-Lombric, un syndicat de Seine-et-Marne, a même externalisé la tâche. Il paye, sur ses propres deniers, un prestataire pour séparer les flux REP et hors REP conformément aux exigences de la filière. « Nous avons connu des débordements à l’extérieur des locaux DDS », explique Laurence Rossignol, ingénieur traitement au Smitom-Lombric. « On enfreignait, à cause de cela, la réglementation. Aujourd’hui, nous sommes revenus à une gestion simplifiée des DDS par les gardiens sur nos onze déchèteries. Et on n’a plus de non-conformités. » Le Smitom-Lombric préfère toutefois ne pas révéler le surcoût d’une telle solution, qui bien sûr n’est pas pris en charge par la filière, même si EcoDDS a accepté cette “expérimentation”.Finalement, pour éviter les chausse-trappes de cette filière, les collectivités sont poussées à orienter tout produit douteux vers le flux hors REP. Avec, pour conséquence, d’alourdir leurs charges. Un comble ! Car, outre ce surtri de précaution, les nouveaux contrats pour l’enlèvement des flux résiduels, censés concerner des volumes plus faibles, sont plus onéreux qu’avant. L’éco-organisme n’a certes pas à financer l’élimination des produits non-contribuant. Mais à l’inverse, les collectivités n’ont pas à éliminer à leur frais des déchets relevant de la REP. « La seule solution viable pour sortir de ce marasme est de passer à une REP financière », plaide Bertrand Bohain, délégué général du Cercle national du recyclage. Cela aurait le mérite de rétablir la mutualisation de la gestion de ces flux, à condition d’arriver à se mettre d’accord sur des ratios financiers correspondant aux DDS ménagers et non ménagers.Fabienne Nedey
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