L’industrie actionnera deux leviers : la valorisation de déchets, en substitution aux énergies fossiles et aux matières premières, et les innovations de rupture, dont les « nouveaux ciments » à faible empreinte carbone et le stockage du CO2 dans les « nouveaux bétons ».
Abaisser de 656 à 130 kg de CO2 les rejets liés à la production d’une tonne de ciment entre 2016 et 2050 : c’est l’ambition « très bas carbone » que poursuit le Syndicat français de l’industrie cimentière (SFIC), qui « va y dédier des moyens importants et avancer vite », affirme sa présidente, Bénédicte de Bonnechose. La trajectoire empruntera une voie rapide, basée sur des solutions existantes ou mûres à court terme, et un cheminement plus long jalonné de ruptures technologiques.
Valorisation accrue de déchets
La production de ciment (18 Mt/an, 2,9% des émissions nationales de CO2 ) recourra davantage aux déchets comme matière, en lieu et place du clinker et de matériaux extraits en carrière (calcaire, argile, gypse), et comme combustible1, évitant l’usage de coke de pétrole, fioul lourd, charbon. Cette double valorisation, qui a réduit de 40% en trente ans les rejets carbonés, porte en 2017 à 2,4 Mt les déchets minéraux (résidus des hauts-fourneaux sidérurgiques ou laitiers, cendres volantes des centrales à charbon) utilisés dans la fabrication du ciment et à 44% la part de combustibles de récupération (meubles, bois, tissus, plastiques, cartons, textiles, mousses impropres au recyclage) brûlés dans les fours.
La valorisation énergétique doit élever le taux de substitution des déchets aux combustibles fossiles à 50% en 2025, le site de LafargeHolcim de Martres-Tolosane (Haute-Garonne) visant les 80% dès 2021.
« Nouveaux » ciments
Réduire la part de clinker (principal constituant hydraulique des ciments courants) au profit de composés cimentaires (calcaire, laitiers, cendres volantes, pouzzolanes, argile calcinée) est « la manière la plus simple de réduire rapidement l’empreinte environnementale », selon le SFIC. Un nouveau ciment pour ouvrages d’art, contenant moins de 50% de clinker, sera normalisé à l’échelle européenne d’ici 18 mois. Les ciments LC3 (Limestone Calcined Clay Cement, associant clinker, calcaire et métakaolin ou argile calcinée), à l’empreinte carbone de 35 % inférieure à celle des ciments courants, le seront d’ici deux à trois ans. « On saura faire à coût constant », assure Bénédicte de Bonnechose. Par ailleurs, le développement de clinkers formés à basse température fera gagner 30% sur l’empreinte carbone et 20% sur les propriétés d’isolation thermique.
Puits de carbone et recyclage
Le projet FastCarb, lancé début 2018, précisera dans trois ans dans quelle mesure le béton déconstruit a naturellement stocké le carbone atmosphérique. 25 à 30% du CO2 émis à la production du béton serait capté par le matériau durant l’exploitation des ouvrages, selon les premières évaluations. Le béton issu de granulats de béton recyclé (GBR) serait aussi plus résistant à l’usure et facilement recyclable.
Les conclusions du projet Recybéton, engagé en 2012, seront dévoilées fin novembre à Pollutec. Elles doivent notamment démontrer que la norme actuelle, qui limite à 20% la part de GBR dans la fabrication de béton, peut être rehaussée.
1. : l’énergie pèse 30 % du coût de fabrication du ciment