Saisi en mars dernier par le Conseil d'État sur une question prioritaire de constitutionnalité posée par l'industrie papetière, le Conseil constitutionnel a jugé conforme à la Constitution l'article L. 425-1 du code des assurances relatif au fonds de garantie des risques liés à l'épandage agricole des boues d'épuration urbaines ou industrielles. Par sa décision du 8 juin 2012, il a toutefois émis une réserve d'interprétation tenant à l'assiette de la taxe sur les boues d'épuration destinée précisément à alimenter ce fonds.
L'élimination des boues d'épuration peut être réalisée par mise en décharge, incinération ou épandage sur des sols agricoles. La création d'un fonds de garantie est destinée à développer ce dernier débouché, fragilisé par la réticence de la profession agricole. Créé par la Lema de 2006, ce fonds permet de garantir aux exploitants agricoles et aux propriétaires fonciers l'indemnisation de dommages écologiques liés à l'épandage, imprévisibles et non pris en charge au titre des contrats d'assurance de responsabilité civile du producteur des boues épandues. La taxe afférente est due par les collectivités (boues urbaines) ou par les délégataires et les exploitants du secteur de l'industrie alimentaire ou du papier qui font construire pour leurs besoins propres une station d'épuration (boues industrielles). Un décret du 18 mai 2009 a défini la base d'imposition de la taxe, liée à la production annuelle de matière sèche. Or, selon les requérants, en décidant d'asseoir la taxe sur la quantité de boues produites et non sur la quantité épandue, le législateur a opté pour un dispositif excédant l'objectif poursuivi, à savoir la promotion de l'épandage des boues et l'indemnisation de certains préjudices résultant de cet épandage. Certaines industries seraient, en effet, dans l'impossibilité tant juridique que technique d'éliminer par voie d'épandage la totalité des boues produites.
Si le Conseil n'a pas jugé de la pertinence du choix de l'épandage retenu par le législateur, il a en revanche retenu le grief de l'inadéquation de la taxe à son objet. Il estime que la différence de traitement instituée entre les boues susceptibles d'être épandues – au regard de la réglementation – pour lesquelles le producteur a obtenu l'autorisation d'épandre et les autres déchets produits non soumis à taxation, car éliminés par stockage ou incinération, est en rapport direct avec l'objet de la taxe. Tel n'est pas le cas, selon lui, pour les boues susceptibles d'être épandues mais pour lesquelles le producteur n'a pas l'autorisation d'épandre, notamment au titre du plan départemental d'épandage. Au regard du principe d'égalité devant les charges publiques, ces dernières ne sauraient, en conséquence, être soumises à taxation, a conclu le Conseil.